Cet article compte beaucoup pour notre groupe. Les mesures de surveillance et de contrôle qu'il prévoit font partie des nouveaux outils dont nous devons nous doter pour faire face à l'évolution de la menace terroriste.
En revanche, le régime de leur mise en oeuvre appelle de notre part des réserves en termes d'équilibre institutionnel et de séparation des pouvoirs. En effet, il s'agit de mesures très contraignantes pour certaines d'entre elles, manifestement restrictives de l'une des libertés individuelles les plus fondamentales : celle d'aller et venir. Or le soin de prononcer ces mesures et de les renouveler est laissé au ministre de l'intérieur, alors que la Constitution fait de l'autorité judiciaire la gardienne de la liberté individuelle.
Nous avons déposé un amendement qui vise à réintroduire le juge judiciaire en cas de prolongation de ces mesures. Nous avons ainsi souhaité concilier efficacité et respect des textes qui organisent la séparation des pouvoirs dans notre République.
Je ne veux pas entrer dans une discussion technique sur la portée de l'article 66 de la Constitution en l'opposant à l'interprétation qui en est faite par le Conseil constitutionnel. Nous observons en revanche une tendance qui consiste, depuis une trentaine d'années, à restreindre l'intervention de l'autorité judiciaire au profit de l'exécutif.
C'est une tendance qui nous interpelle. La question n'est pas de savoir qui, du juge administratif ou du juge judiciaire, serait plus compétent ou plus indépendant. Le sujet pas abstrait : il s'agit, très concrètement, de l'équilibre entre les trois pouvoirs dans notre République : le législatif qui, aujourd'hui encore, n'occupe peut-être pas sa juste place, le judiciaire, dont l'intervention est de plus en plus restreinte, et l'exécutif qui, peu à peu, concentre beaucoup de pouvoirs entre ses mains.