Du coup, on se retrouve avec l'expression « coûts imputés aux externalités environnementales liées au produit pendant son cycle de vie ». Quel univers extraordinaire que celui où l'expression « circuit court », qui appartient à la langue commune, qui est comprise par tous nos concitoyens et dont on voit bien ce qu'elle signifie politiquement, se transforme en « coûts imputés aux externalités environnementales liées au produit pendant son cycle de vie » ! Réintroduisons un peu de simplicité dans la langue de l'Assemblée nationale pour qu'elle soit comprise par tout le monde !
Par ailleurs, je vois bien l'intérêt d'utiliser la cantine comme levier, car elle offre une possibilité d'action publique beaucoup plus directe que la consommation privée. Mais il ne faudrait pas qu'un fossé se creuse entre les deux, les cantines s'engageant dans une démarche en faveur du bio, du local et à réintroduire la saisonnalité avec des produits de saison, tandis que la consommation privée serait livrée à la malbouffe.
L'étude publiée par le Secours populaire doit nous alerter sur le fossé que l'on risque de créer entre les ambitions de cette loi et la réalité de la consommation des ménages. Quand quasiment un Français sur deux considère qu'il a du mal à payer la cantine de ses enfants, il y a un problème social à résoudre ! On ne peut pas se contenter d'améliorer ce qui est mangé dans les cantines sans permettre à l'ensemble des enfants de ce pays d'accéder à ces cantines. Il faudrait donc introduire un objectif social.
Un Français sur cinq déclare avoir du mal à prendre trois repas par jour. Vous est-il déjà arrivé que la faim surgisse au détour d'une conversation, alors que vous êtes en train de dîner tranquillement avec un étudiant et qu'il vous dit : « Je n'ai pas mangé à midi parce que je n'en avais pas les moyens » ? C'est immédiatement le silence, un blanc dans la discussion, car on se dit que la faim existe toujours dans notre pays, que tout le monde n'a pas ses trois repas par jour.
On apprend aussi qu'un Français sur quatre estime ne pas avoir les moyens de manger des fruits et des légumes chaque jour
C'est un fléau auquel nous devons nous attaquer. Prenons garde à ne pas afficher une ambition législative qui ne trouve pas de traduction dans la réalité. Se nourrissant d'illusions, on fabrique des lois, on fixe des dates, on détermine des pourcentages. Tout cela est très joli sur le papier, mais quels moyens nous donnons-nous pour atteindre ces objectifs ?
Vous regrettiez, monsieur le ministre, que seulement 6,5 % de la surface agricole utile soit consacré à l'agriculture biologique, alors qu'un objectif de 15 % avait été fixé. Nous sommes favorables à l'augmentation de ce seuil pour le porter à 20 %, 50 %, voire 100 %, et on y viendra ! Mais on ne peut se contenter de déplorer la faiblesse de ce taux. Quels moyens la puissance publique se donne-t-elle pour atteindre l'objectif plus ambitieux qu'elle fixe dans la loi ? C'est vrai de la proportion de surface agricole utile consacrée au bio, mais aussi de la consommation de produits biologiques dans les cantines et plus généralement de l'accès de tous les Français à une alimentation convenable.