Je tiens avant tout à remercier M. Kasbarian de nous avoir alertés sur la question. Je lui propose néanmoins de retirer son amendement. Je vais vous apporter les précisions nécessaires sur le renforcement du décret relatif aux investissements étrangers en France.
Ce renforcement s'inscrit dans une stratégie économique globale qui vise à attirer les investisseurs en France. Et plus vous attirez les investisseurs – et les résultats de notre politique sont là puisque les IEF ont fortement augmenté –, plus il faut être en mesure de protéger les secteurs les plus sensibles et les technologies sur lesquelles nous avons investi des moyens financiers et humains importants. J'ai déjà eu l'occasion de l'affirmer brutalement mais je maintiens mes termes : la France n'a pas vocation à se faire piller ses technologies et ses savoir-faire.
Je rappelle également que les pays considérés comme les plus libéraux sont en réalité ceux qui se protègent le plus : il n'est que de songer au Comité sur les investissements étrangers aux États-Unis (CFIUS). Il en va de même pour la Chine. Toutes les puissances technologiquement avancées protègent leurs technologies ; seule l'Europe, depuis des années, dans une espèce de course déraisonnable, effrénée, à l'ouverture, n'a pas su se doter des instruments nécessaires pour protéger son économie comme le font les plus grandes économies de la planète.
Je me réjouis qu'il y ait à cet égard une prise de conscience au niveau européen depuis quelques mois voire quelques années. Sous l'impulsion de la France, un règlement européen qui permet de passer au crible les investissements étrangers en Europe a été adopté. C'est un vrai progrès et, j'y insiste, la France a été à la pointe, avec le Président de la République, le ministre de l'économie et des finances et la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, pour aboutir à ce résultat.
Le décret sur les investissements étrangers en France sera publié, modifié, d'ici à l'examen du texte en séance afin que nous puissions alors en discuter. Il est prévu des avancées dans deux directions. La première est l'élargissement des secteurs – plusieurs secteurs des plus stratégiques ne sont en effet pas concernés par le décret en vigueur : les drones, le spatial, la recherche-développement en matière de cybersécurité, d'intelligence artificielle, de robotique, de fabrication additive et de semi-conducteurs. La seconde vise à renforcer l'efficacité du décret : nous allons mettre en place une procédure de sanctions plus stricte que celle en vigueur ; elle sera graduelle et pourra atteindre des montants très importants grâce à un coefficient multiplicateur du chiffre d'affaires de l'entreprise cible. Si un investisseur, malgré nos décisions, continue son investissement dans l'entreprise cible, il pourra se voir imposer une amende du montant d'un coefficient multiplicateur du chiffre d'affaires de l'entreprise cible, ce qui permettra à la fois une approche graduelle et de prononcer une sanction très dissuasive puisque les montants de l'amende pourront être vite très importants.
La French Tech, ayant besoin d'investissements et d'investissements rapides, était préoccupée de ce que l'extension du décret ait un caractère dissuasif sur les investisseurs potentiels. Sur sa proposition – excellente –, nous avons ouvert la possibilité de demander un rescrit préalable à l'investissement aux sociétés cibles d'acquisition elles-mêmes, ce qui leur permettra d'une part d'être sûres qu'un investisseur ne risque pas d'être rejeté par le ministère de l'économie et des finances, et ce qui permettra d'autre part à la French Tech d'avoir un investissement sécurisé.
Je rappelle pour finir que, sur décision du Président de la République, nous avons également, mais je ne vous donnerai pas d'éléments sur ce point puisqu'ils sont couverts par le secret défense, réorganisé la chaîne de commandement et de décision sur la question de la sécurité économique en France.