Les recherches sur l'infertilité sont à peu près inexistantes. Il existe très peu de laboratoires qui se préoccupent de travailler sur le sujet et qui en ont les moyens. On parle beaucoup des perturbateurs endocriniens : quelques recherches sont conduites sur l'animal, mais chez l'humain, c'est très difficile. S'il est aisé d'étudier les spermatozoïdes – ils sont produits chaque jour sans douleur par des hommes volontaires –, il est plus compliqué de faire des recherches sur l'ovule, la cellule la plus rare du corps, et les perturbations de l'ADN qui seraient apportées par des substances chimiques, entre autres. Il est certain qu'il existe une carence dans ce domaine. Mon point de vue est qu'il faut augmenter le nombre des recherches mais, avant même d'obtenir des résultats, il faut s'abstenir d'utiliser des substances dont on a de bonnes raisons de penser qu'elles sont responsables d'infertilités animales et humaines.
Pour ce qui est de la conservation des ovules, mon avis est mesuré. On voit déjà les dérives aux États-Unis, où cette technique s'est répandue. Aujourd'hui, elle constitue une précaution en vue de la procréation, que prennent même celles qui n'ont pas de raison d'être inquiètes. C'est logique : il existe une offre technique, elle a un coût, on s'efforce de convaincre de plus en plus de monde. Il faut savoir par ailleurs que les chances pour une femme autour de la quarantaine d'obtenir une grossesse grâce à des ovules conservés ne sont pas très élevées. Donneuse d'ovules pour elle-même, en quelque sorte, il lui aura fallu subir de nombreux traitements hormonaux et beaucoup d'interventions, lourdes, pénibles, pour prélever les ovules destinés à la congélation. Cela vaut-il vraiment le coup ? N'a-t-on pas créé une espèce d'angoisse permettant de recruter des volontaires ?
Si la loi autorise cette technique en France, ce ne sont pas seulement les femmes présentant les signes annonciateurs de la ménopause – raréfaction des ovules, cycles perturbés – qui l'utiliseront, mais beaucoup d'autres. On verra la même chose que pour les FIV : des femmes parfaitement fertiles ou qui ont un petit problème – peut-être conjugal ? – passant par les artifices des biotechnologies. Il faudrait limiter l'usage de cette technique à des indications médicales très strictes.
Il est drôle que seule l'insémination post mortem donne matière à parler des dérives de l'insémination, alors qu'elles sont présentes dans la pratique de l'IAD au quotidien, avec la sélection des donneurs et leur appariement avec les receveuses. Le risque eugénique n'existe pas dans le cas de l'insémination post mortem – puisque c'est le sperme du partenaire masculin qui sera utilisé. Ce sujet ne pose pas à mes yeux de problème fondamental, sinon qu'il peut être débattu avec les psychologues, dans la mesure où il peut être traumatisant pour l'enfant d'être né d'un mort, mais je n'ai aucune compétence pour en juger.