Intervention de François Ruffin

Séance en hémicycle du vendredi 28 septembre 2018 à 15h00
Croissance et transformation des entreprises — Article 22

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Ruffin :

Cet article nous conduit encore une fois à nous interroger sur le rôle des banques. Le Gouvernement veut lever certaines contraintes réglementaires afin que plus d'entreprises se financent sur les marchés d'actions.

Je citais tout à l'heure le cas de l'entreprise Cube Creative, qui intervient dans le domaine de l'animation en trois dimensions. Malgré ses bons résultats et un chiffre d'affaires de 3 millions d'euros, cette entreprise a rencontré de grandes difficultés, d'abord pour couvrir un petit découvert, puis pour déménager, enfin pour ouvrir un deuxième site. J'ai interrogé l'un de ses fondateurs, qui est aussi directeur général, et voici ce qu'il m'a répondu : « J'ai envie de dire : non. C'est pas notre métier. Nous, on connaît le marché de l'animation ; on ne veut pas se lancer dans des trucs de financiers. Je préférerais que ce soit la banque. On ne tient pas à se retrouver entre les mains d'un investisseur en capital risque. » On lui avait donc proposé ce type de financement, et il avait refusé. Cela conduit à s'interroger sur la bonne manière de financer les entreprises : est-ce par les marchés d'action ? Est-ce par des fonds d'investissement ? Ou est-ce la banque qui doit jouer ce rôle ?

Lorsque Pascal Canfin était député européen, nous nous étions rendus ensemble à Francfort à la Banque centrale européenne. Il avait utilisé une image frappante pour décrire l'action de cette banque, au moment où elle confiait des milliards d'euros aux banques afin qu'elles se refinancent : il l'avait comparée à un tuyau percé. On ouvre le robinet, mais on ne sait pas ce qui ira réellement aux ménages, aux entreprises et aux services publics. Voilà la question : que font les banques de notre argent ?

J'en reviens à la question que je posais tout à l'heure, et à laquelle je n'ai pas eu de réponse : comment mon conseiller bancaire peut-il savoir où va le pognon ? Comment le directeur de ma banque peut-il savoir où va l'argent – vous voyez que j'essaye d'élever mon niveau de langage ?

J'ai lu – je ne suis pas spécialiste de ces questions, il est donc possible que ce que je vais vous dire soit un peu amalgamé – que, selon les accords de Bâle actuellement en vigueur, lorsqu'une banque prête aux PME, c'est considéré comme un placement à risque, tandis que si elle utilise les mêmes sommes pour faire de la spéculation, alors ce n'est pas considéré comme risqué. Les accords de Bâle incitent donc les banques à ne pas investir dans les PME et à se lancer dans les produits spéculatifs.

Au lieu d'encourager, avec cet article, les entreprises à aller davantage sur les marchés d'actions, il faudrait donc se demander comment faire pour que les banques financent l'économie, notamment les PME.

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