Intervention de Laurent Garcia

Séance en hémicycle du mardi 9 octobre 2018 à 21h30
Lutte contre la manipulation de l'information — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurent Garcia :

Madame la présidente, madame la ministre de la culture, madame la rapporteure pour avis de la commission des lois, monsieur le rapporteur de la commission des affaires culturelles, mes chers collègues, on a finalement le bonheur que l'on se construit. Ainsi, les deux propositions de loi qui sont présentées à nouveau devant notre assemblée sont le fruit d'un constat que nous sommes nombreux à partager sur ces bancs : nous sommes confrontés, dans des proportions beaucoup plus grandes qu'auparavant, à la circulation de ce qu'il est communément admis d'appeler « les fausses informations », alias « les infox ». Ces fausses informations, par leur nombre et par leur importance, compromettent la sérénité du débat démocratique qui doit normalement avoir lieu dans nos régimes. La discussion et la controverse sont les moteurs de nos démocraties, mais doivent pour cette raison s'exercer à partir d'un cadre et sur des enjeux qui ne sauraient être remis en cause : l'information vérifiée, la vérité des faits et l'identification de l'objet. En dehors de ces conditions d'exercice, il est vain d'espérer voir la raison l'emporter ; nous en avons malheureusement des exemples tous les jours.

Le groupe La République en Marche, en inscrivant à l'ordre du jour ces deux propositions de loi, a voulu s'emparer de ce difficile sujet moderne et tenter de trouver un cadre répressif légal. Nos débats ont été vifs et parfois houleux, tant nous comprenions bien que la ligne était difficile à trouver pour ne pas contrevenir aux libertés qui sont la marque de notre république. Je crois pourtant que le texte issu de la première lecture y parvenait – certes imparfaitement, mais il n'avait pas l'ambition de tout régler ! Il posait des barrières claires à la diffusion de ces informations mensongères et ambitionnait de développer chez les plus jeunes l'esprit critique, réponse à mes yeux la plus convaincante sur le long terme.

Chacune des dispositions proposées répond à des besoins spécifiques.

Ainsi, le refus de conventionnement par le Conseil supérieur de l'audiovisuel permettra de répondre aux risques graves d'atteinte à nos principes fondamentaux. De même, nous contrôlerons mieux les demandes de conventionnement, et le CSA pourra refuser la signature d'une convention si le demandeur est placé sous l'influence d'un État étranger dont la volonté manifeste serait d'influencer le bon déroulement d'une élection. Les sanctions pourraient aller même jusqu'à la suspension temporaire d'un service conventionné pendant la période électorale, dans le respect des procédures prévues dans notre droit, et cette suspension pourrait être décidée unilatéralement par le CSA si la diffusion et l'influence dudit service portaient atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation.

Le groupe du Mouvement démocrate et apparentés, se félicite par ailleurs des mesures introduisant un devoir de coopération des opérateurs de plateforme en ligne. Il s'agit d'un élément essentiel de cette proposition de loi, qui est amené à donner des résultats rapidement. En effet, l'obligation qui leur incombera de faire figurer un dispositif permettant à leurs utilisateurs de signaler les contenus susceptibles d'être des fausses informations, de troubler l'ordre public ou d'altérer la sincérité d'un scrutin marquera une étape importante dans cette coopération. Rappelons que ces mêmes opérateurs devront également agir sur la transparence des algorithmes, sur la promotion des contenus considérés comme fiables, sur la lutte contre les faux comptes, ainsi qu'en matière d'éducation aux médias et à l'information. Si l'on y ajoute l'obligation pour eux de désigner un représentant légal en France, nous voyons bien que les dispositifs introduits par les présentes propositions de loi sont de nature à réguler un système de la même manière que nous agissons sur notre audiovisuel intérieur.

Enfin, nous saluons les apports introduits en première lecture concernant le renforcement de l'éducation aux médias et à l'information dans le cadre de l'enseignement moral et civique. Notre groupe estime que c'est sur ce terrain qu'un travail de longue haleine doit être entrepris pour aiguiser l'esprit critique des jeunes, souvent les plus directement concernés par les fausses informations qui circulent, pour une très grande part d'entre elles, sur les réseaux sociaux. C'est en effet à l'école que beaucoup peut se faire, ainsi que par un investissement de chacun sur le sujet. C'est pourquoi nos enseignants doivent aussi être formés aux techniques de détection des fausses informations et être préparés à transmettre à leurs élèves les moyens de repérer ce qui relève d'une bonne information ou d'une mauvaise.

À toutes ces mesures, le groupe Mouvement démocrate et apparentés apportera son soutien.

Nous regrettons que le Sénat n'ait pas jugé bon d'étudier ce texte qui répond à un vrai sujet d'aujourd'hui. Il est essentiel que nous puissions avancer et trouver les moyens d'être plus actifs que nous le fûmes par le passé. Nous comprenons les réserves que ces textes peuvent susciter, mais nous pensons que le modus vivendi nous permettra de franchir une première étape qui devra, au besoin, être évaluée et ajustée à l'avenir. Quoi qu'il en soit, le statu quo n'était pas satisfaisant. Je crois que cet état d'esprit est largement partagé au sein de la majorité. Ne négligeons pas non plus le fait que cette problématique se pose dans d'autres États européens qui s'interrogent, eux aussi, sur les meilleures réponses à apporter. Nous serons évidemment vigilants sur le suivi des dispositions, et saurons tirer le meilleur des diverses expériences qui auront été menées par nos voisins en la matière.

Mes chers collègues, le texte auquel nous sommes parvenus est une étape, mais il nous semble à ce stade équilibré entre des mesures de contrôle et de répression, d'une part, et des mesures éducatives, d'autre part. C'est pourquoi le groupe Mouvement démocrate et apparentés le soutiendra.

1 commentaire :

Le 12/10/2018 à 18:15, Laïc1 a dit :

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"Madame la présidente, madame la ministre de la culture, madame la rapporteure pour avis de la commission des lois, monsieur le rapporteur de la commission des affaires culturelles, mes chers collègues,..."

...mes chers concitoyennes et concitoyens ? Ah oui, non, eux, ils n'existent pas...

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