Intervention de Alain Grimfeld

Réunion du mercredi 19 septembre 2018 à 18h15
Mission d'information sur la révision de la loi relative à la bioéthique

Alain Grimfeld, professeur de médecine, président d'honneur du CCNE :

Depuis six ans, j'ai l'honneur d'être le président du comité d'éthique d'une association à but non lucratif relevant de la loi de 1901 et coiffant cinquante établissements médico-sociaux, dont les deux tiers sont des EHPAD et un tiers des établissements hébergeant et accueillant des personnes en situation de handicap.

J'ai donc pu prendre la mesure de la différence existant, à l'intérieur des EHPAD, entre les personnes effectivement âgées et dépendantes, qui présentent des troubles cognitifs de la première importance et sont catégorisées comme étant devenues incompétentes et inutiles à la société, et les autres. C'est inadmissible. C'est méconnaître ce qu'il se passe réellement au sein de l'établissement, alors que nous voulons justement, après avoir fait évoluer les maisons de retraite vers la médicalisation, faire que cette conception nouvelle ne reste pas une coquille vide.

Il ne s'agit pas de revenir en arrière, mais de regarder vers les transitions que nous pourrions offrir à des personnes qui, grâce aux progrès de la médecine, sont restées compétentes malgré l'avancée en âge ou grâce à elle. Il faut leur permettre de conserver leurs compétences et d'en acquérir encore plus, quel que soit leur âge ; des publications en attestent ; je ne vous livre pas mes états d'âme. Pourquoi priver notre société des compétences persistantes – et non pas résiduelles – qui sont le fruit d'une expérience ne demandant qu'à être livrée à d'autres, y compris dans le domaine professionnel, et pas uniquement aux jeunes ?

Puisqu'à juste titre nous souhaitons faire évoluer les établissements médico-sociaux, ne pourrions-nous pas, sans dépenses rédhibitoires, organiser à l'intérieur de ces établissements, dans des locaux réservés à cet effet, des ateliers où ces aînés compétents transmettraient leurs compétences persistantes ainsi que leur expérience ? Cela pourrait prendre place avant le placement des intéressés en EHPAD, et s'adresser notamment aux plus jeunes, singulièrement aux plus défavorisés d'entre eux, chacun comprendra ce que j'entends par là en songeant à la notion d'ascenseur social. Ainsi existe-t-il, en Bretagne, des « maisons des aînés », appellation très pertinente car les aînés présents dans ces établissements sont compétents, et le sont restés. Pourquoi ne pas bénéficier de leurs compétences persistantes ?

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