Il nous faut donc fixer un nouveau cap, insuffler une énergie nouvelle. Il nous faut préserver l'héritage des combats du siècle passé, emplis de justice et d'égalité, car vivre longtemps et en bonne santé est la première des justices et la plus grande des égalités.
Sans décliner à l'envi les articles de la présente proposition de loi, je voudrais esquisser devant vous les grands principes de cet horizon à bâtir et dire d'abord que l'homme doit être en toutes parts et pour toute cause la raison de nos combats. L'individu, le patient doit être au coeur du système avec pour idée majeure et pour toute politique que la santé est construite pour et à partir de lui.
Construire une politique de santé ambitieuse, c'est accepter que les patients d'hier ne soient plus ceux d'aujourd'hui, c'est accepter que les professionnels de santé changent au gré des exigences nouvelles et des progrès technologiques.
C'est dans la nécessité de bâtir une relation de confiance avec les professionnels de santé que cette proposition de loi a puisé sa sève. C'est par l'objectif de transversalité et d'horizontalité qu'elle est mue, avec le souci ardent de replacer le patient au coeur du système, de remettre l'individu au coeur des préoccupations, au centre des découpages sanitaires, des arbitrages comptables et budgétaires.
Les villages de la santé que nous appelons de nos voeux n'ont pas d'autre objectif que de créer des réseaux entre ces professionnels, constitués non plus à partir de l'offre de soins mais à partir de la demande de soins, de là où résident les individus, pour leur offrir une prise en charge au plus vite et au plus proche de chez eux, parce que cette proximité est une demande forte des patients et qu'elle recouvre aussi une véritable dimension d'aménagement du territoire, d'égalité d'accès à la santé, en ville comme à la campagne.
Innovation ou juste retour des choses, les villages de la santé associent les collectivités locales, en plus de tous les acteurs de santé d'un territoire, sans exclusive. Ce n'est que justice d'y associer des élus locaux qui pendant plus d'une décennie, en l'absence d'une réponse de l'État, ont tenté d'apporter une solution aux difficultés de la démographie médicale.
Oui, ce sont les maires, qui, le plus souvent, ont reçu ces patients en déshérence lorsque leur médecin de famille prenait la décision, légitime, de partir à la retraite.
Oui, ce sont les maires qui ont parfois sacrifié des budgets d'investissement et de fonctionnement pour tenter de recruter de nouveaux médecins, de nouveaux professionnels de santé, alors que l'État n'apportait que de faibles subsides et parfois des complications administratives. Les collectivités locales doivent demeurer au coeur de l'organisation territoriale de la santé, parce qu'elles y ont pleinement leur place aux côtés des professionnels de santé, mais pas à leur place, aux côtés de l'État, mais pas à sa place.
La France ne peut demeurer plus longtemps éloignée d'une véritable politique de santé qui prenne tout à la fois en compte le curatif et la dispensation de soins, mais qui prenne aussi la juste mesure d'une politique de prévention et d'éducation à la santé ambitieuse, gouvernée et financée.
C'est à l'école que les actions d'éducation à la santé devront être mises en oeuvre, parce que c'est dès le plus jeune âge qu'il est possible de corriger les comportements dont on sait qu'ils deviendront immanquablement des pathologies graves ou chroniques.
Il est donc on ne peut plus souhaitable que les enseignants soient sensibilisés et formés à cette nécessité d'une éducation à la santé. Il faut que les éducateurs sportifs qui prennent en charge nos enfants sur le temps périscolaire ou extrascolaire soient eux aussi sensibilisés et formés à cet impératif sociétal qu'est l'éducation à la santé.
Pour cela, il est urgent d'opérer un décloisonnement : de la PMI à la médecine scolaire en passant par la médecine du travail où les médecins traitants, tous les professionnels de santé qui interviennent en matière préventive doivent entretenir un dialogue permanent.
Mes chers collègues, ce texte ne prétend pas au grand soir ni à une énième révolution de notre système de santé. Il constate des dysfonctionnements ; il prend acte des progrès générés par l'action du Gouvernement ; il tient compte des blocages, des aspérités légales et réglementaires. Il appelle enfin à une respiration nouvelle, à un regard nouveau.
Combien de professionnels de santé ai-je rencontré qui m'ont avoué ne pas avoir d'autre choix que de détourner les normes et les règles qui leur sont imposées d'en haut, décidées de loin, pour pouvoir soigner leurs patients, pour pouvoir rendre un service médical de qualité ?
Combien d'entre eux m'ont dit, paraphrasant un célèbre Président de la République : « Foutez-nous la paix ! » Que l'on cesse de normer, de réglementer, d'édicter, d'écrire le droit de la santé. Combien de circulaires se retrouvent chaque jour sur le bureau des directeurs de cliniques et d'hôpitaux, qui ne seront jamais mises en oeuvre faute d'être utiles et efficaces ?
De ces constats qui confinent au cri d'alarme, j'ai acquis la conviction que notre système de santé doit se simplifier, se moderniser, s'aérer et qu'il doit le faire vite. Seules ces exigences permettront véritablement à la santé de devenir davantage qu'elle ne l'est aujourd'hui horizontale et collaborative.
Les milliers de professionnels de santé qui maillent la France, toutes disciplines confondues, ont été bien formés et diplômés. La pluridisciplinarité est une richesse à laquelle il convient de donner une place de choix à l'hôpital comme en ambulatoire.
Même si nous partageons les constats et les solutions, votre majorité s'entêtera vraisemblablement à rejeter cette proposition de loi, avec pour unique motif l'examen prochain du plan de financement de la sécurité sociale – PLFSS – et la mise en oeuvre du plan Ma Santé 2022 dans le courant de l'année 2019.
Alors que nous faisons de la prévention une priorité, ajoutant à votre plan la nécessité partagée d'une gouvernance et d'un pilotage, vous allez rejeter ce texte !
Alors que nous faisons, comme vous, des communautés professionnelles territoriales de santé – CPTS – la pierre angulaire de l'organisation territoriale en santé, vous allez rejeter ce texte !
Alors que nous cherchons, comme vous, par tous les moyens, à simplifier les procédures, à faciliter les exercices, vous allez rejeter ce texte !