Trois mois, ce délai peut paraître long à nos concitoyens, trop long. Comment l'expliquer ? Nous sommes dans un État de droit dans lequel chacun doit bénéficier d'un délai raisonnable pour être entendu. Ainsi, la décision d'expulsion et la délivrance par le juge d'un commandement de quitter les lieux sont-elles assorties de délais qui repoussent le moment où le squatteur est effectivement délogé.
Cependant, ces délais peuvent être raccourcis : le juge des référés peut très bien les réduire ou les supprimer lorsque l'occupant illégitime est entré dans le lieu par voie de fait.
Prenons un exemple qui avait ému l'opinion, à juste titre, il y a quelques années et que vous aviez cité, monsieur le rapporteur : celui de Mme Maryvonne Thamin, âgée de quatre-vingt-trois ans, qui s'était trouvée confrontée à des squatteurs dans sa maison inoccupée de Bretagne. Je précise que ce bien n'était ni sa résidence principale ni sa résidence secondaire.
Dans cette affaire, le tribunal de Rennes avait mis moins d'un mois, entre le début de la procédure judiciaire et le délibéré, pour ordonner l'expulsion sans délai des squatteurs. Les dix-huit mois d'occupation de cet immeuble, dont la presse s'était fait l'écho, s'étaient en réalité écoulés en dehors de toute procédure judiciaire. Autrement dit, Mme Maryvonne Thamin avait attendu dix-huit mois avant de saisir la justice.
J'en viens à l'hypothèse dans laquelle le bien occupé par un squatteur est votre domicile, que ce soit votre résidence principale ou secondaire, même occupée très ponctuellement. Ce bien est alors protégé au nom du respect de la vie privée.
Dans cette hypothèse, vous pouvez obtenir l'expulsion rapide du squatteur grâce à la procédure prévue à l'article 38 de la loi instituant le droit au logement opposable, dite « loi DALO » – c'est le deuxième cas. Selon cette procédure, le préfet recourt à l'expulsion forcée du domicile dès lors que le propriétaire remplit trois conditions : il a déposé plainte ; il a apporté la preuve que le logement constituait son domicile ; il a fait constater l'occupation illicite par un officier de police judiciaire.
Je précise que cette procédure d'expulsion peut être lancée à tout moment et que le délai d'expulsion n'est pas limité au délai de flagrant délit de quarante-huit heures à compter du début du squat. De plus, depuis l'adoption, en 2015, d'une proposition de loi issue du Sénat, le code pénal réprime non seulement l'introduction dans le domicile d'autrui, mais aussi le maintien illicite dans celui-ci. Dès lors, le fait que le squat soit installé depuis plus ou moins de quarante-huit heures est une circonstance indifférente, car l'infraction est dite « continue ».
Ainsi, avec cette procédure, l'expulsion peut être mise en oeuvre dans un délai très court. Mais encore faut-il que ladite procédure soit bien connue par les préfectures et leurs services pour être appliquée. Le défaut ici est non pas une lacune dans la législation, mais un manque d'information sur les textes de loi. C'est pourquoi j'ai demandé au ministre compétent de prendre l'engagement d'adresser un courrier aux préfectures afin de leur détailler la procédure. Cette idée a, semble-t-il, été validée par le Premier ministre.
Venons-en au troisième cas : il vous est aussi possible d'engager une procédure de justice afin d'obtenir une décision d'expulsion. Comme nous l'avions promis, monsieur le rapporteur, cette procédure a été améliorée très récemment, dans le cadre de la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, la loi ÉLAN, que nous avons adoptée il y a quelques jours. Au cours de la commission mixte paritaire, députés et sénateurs se sont en effet accordés pour adapter la législation sur le sujet. Je pense que ces évolutions pourront vous satisfaire.