Intervention de Stéphane Viry

Séance en hémicycle du jeudi 11 octobre 2018 à 15h00
Consolidation du modèle français du don du sang — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Viry :

C'est éminemment regrettable. La majorité parlementaire pousse même la perfidie, dans ses amendements, jusqu'à modifier le titre de la proposition de loi « visant à la consolidation du modèle français du sang », qui devient une simple proposition de loi « relative au don du sang ». Il est vrai, chers collègues de la majorité, qu'après avoir supprimé 90 % de ce texte, la nouvelle version ne consolide plus grand-chose : elle se limite à la transposition d'une directive européenne et à une redondance législative pourtant nécessaire. La version issue des travaux de la commission est bien loin de la version originale et ambitieuse qui, elle, consolidait bien le système français auquel nous sommes tant attachés.

Les mesures proposées par Damien Abad et le groupe Les Républicains avaient un double objectif : d'une part, créer un statut du donneur de sang, tout simplement mais avec beaucoup de force ; d'autre part, consolider les institutions relatives au don du sang. Cette proposition de loi permettait ainsi de renforcer le droit d'absence des salariés pour faire un don, puisque la population qui donne le moins est la population active. Nous proposions également une grande campagne d'information, la mise en place d'un contrôle sanitaire identique des médicaments dérivés du sang provenant de l'étranger – cette question est capitale – ou encore l'inscription du groupe sanguin sur les cartes d'identité des volontaires. Il n'en sera rien, hélas, alors que notre modèle doit être préservé et sauvegardé.

Enfin, un amendement adopté en commission a introduit un nouvel article visant à la non-discrimination de certains donneurs. Je vous ai écoutée avec attention, madame la ministre, et je tiens à mon tour à vous donner un avis personnel sur ce sujet.

Nous sommes confrontés à une situation de baisse croissante du nombre de dons et d'augmentation du besoin de sang pour sauver des vies. Tout en préservant la sécurité, nous ne pouvons pas nous passer de centaines, voire de milliers de donneurs. Ainsi, l'obligation faite aux hommes ayant des relations homosexuelles d'avoir plus de douze mois d'abstinence, alors que cette durée est de quatre mois pour les autres donneurs, est tout simplement discriminatoire. Les techniques modernes de tests permettent d'assurer une sécurité accrue du sang donné.

Par ailleurs, est-il encore d'actualité, en 2018, de parler d'orientation sexuelle plutôt que de comportement sexuel ? Nous apprenons que le Gouvernement souhaite supprimer, par amendement, cet article voté en commission – nous en débattrons sans doute. Son premier argument est que cette disposition serait redondante avec le droit existant. Pourtant, si le droit existant était suffisant, aurions-nous besoin d'adopter cet article ? Bien sûr que non ! L'exigence d'une abstinence de douze mois constitue une exclusion de fait dont on ne dit pas le nom.

Comme vous l'avez dit vous-même, madame la ministre, l'exposé sommaire de votre amendement précise que vous vous êtes engagée, il y a un an, « à porter les travaux pour faire évoluer les critères de sélection des donneurs de sang concernant les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes ». Je vous ai écoutée, mais force est de reconnaître, et de déplorer, que depuis un an, rien n'a changé. Vous nous avez annoncé des évolutions dans quelque temps, le 14 novembre avez-vous dit. Je déplore qu'il ait fallu déposer cette proposition de loi pour faire réagir le Gouvernement sur une question aussi essentielle.

Cet engagement avait été pris il y a fort longtemps – en 2006 par Xavier Bertrand, en 2011 puis en 2012 par le gouvernement socialiste. C'est une donc une question ancienne qui, hélas, n'a pas connu de réponse contemporaine. Je déplore profondément cette discrimination persistante alors que nous avons encore et toujours besoin de sang donné dans des conditions de sécurité.

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