Intervention de Georges Juttner

Réunion du jeudi 27 septembre 2018 à 8h45
Mission d'information sur la révision de la loi relative à la bioéthique

Georges Juttner, président de la commission de bioéthique de l'Association Philosophique Française Le Droit Humain :

Madame Thill, vous avez parlé de l'inégalité entre hommes et femmes. Je pense qu'il est clair pour nous tous ici que les femmes ne vont pas se venger pendant trois mille ans de leur statut d'opprimées. Pour les humanistes, il n'y a aucun doute : les hommes et les femmes doivent avancer ensemble.

Il n'en existe pas moins, à mon sens, une confusion dans le lexique social, entre l'égalité hommes-femmes, qui vient se substituer très subtilement à l'égalité des droits. Et je crois que ce dont nous parlons, c'est de l'égalité des droits et non pas d'un gommage de la différence des sexes. On a suffisamment dit qu'il fallait deux gamètes différents, mâle et femelle. Ne confondons donc pas l'égalité homme-femme avec l'égalité des droits.

Maintenant, la loi devrait-elle être collective ou individuelle ? Je suis de ceux qui pensent qu'elle devrait être la plus collective possible. En effet, dès qu'on se met à couper les questions en tranches, on finit par faire de la marmelade !

Je m'explique : nous avons évoqué tout à l'heure la question du statut de l'enfant, et nous avons été quelques-uns à évoquer l'existence de lois contradictoires concernant l'enfant. Certains ont fait remarquer que nous ne respections pas la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE). C'est exact. Mais nous savons aussi que des hommes vont faire des GPA dans des pays le plus souvent sous-développés – c'est une utilisation abusive de femmes pauvres – puis reviennent en France. Un des deux hommes adopte l'enfant. Ensuite, il faut qu'ils se marient, et qu'ils adoptent ensemble. Ce sont des tricheries identitaires qui me dérangent beaucoup.

J'en reviens à la contradiction entre les lois. Outre que nous ne respectons pas la CIDE, la loi donne toujours le droit aux femmes d'accoucher sous X, ce qui est complètement en contradiction avec les dispositions permettant d'accéder à ses origines. C'est ce que je voulais dire quand j'ai déclaré que la loi devrait être la plus générale possible. À titre de boutade, j'ai entendu dire qu'il y avait un projet européen relatif à la taille de la palourde que l'on serait autorisé à pêcher : ce n'est pas ça la loi… Bruxelles a renoncé à ce projet, et un tel exemple revient un peu à regarder la situation par le petit bout de la lorgnette, c'est vrai, mais je défends l'idée que la loi doit être la plus générale possible.

La question du sort de l'humanité est intéressante, et c'est un concept sur lequel nous travaillons beaucoup. Beaucoup d'entre nous ne savent peut-être pas ce qu'est le bien de l'humanité, mais on sait en quoi consiste le mal pour elle. Je reste arc-bouté sur le précepte d'Hippocrate, qui guide toute ma démarche : primum non nocere, c'est-à-dire d'abord ne pas nuire, deinde dolorem sedare, c'est-à-dire ensuite apaiser la douleur. J'ai l'impression que c'est le fond de nos interventions ce matin.

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