Intervention de Éric Alauzet

Réunion du mercredi 17 octobre 2018 à 9h45
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Alauzet, rapporteur pour avis :

Je voulais d'abord pointer une petite incohérence dans vos propos, monsieur le président. Vous affirmez qu'il n'est pas pertinent de se référer à l'inflation pour parler de l'ONDAM, compte tenu notamment de critères comme le vieillissement de la population, et qu'il ira bien au-delà de 2,5 % – chiffre qui témoigne cependant, selon moi, de ce que nous consacrons les moyens nécessaires à la santé –, tout en nous expliquant que se fonder sur un tendanciel à 4,5 % pour mesurer les économies revient à reprendre des références dépassées. C'est quelque peu contradictoire, mais l'essentiel est que nous engageons un effort très sensible par rapport à la progression tendancielle de l'ONDAM.

Pour ce qui concerne l'hôpital, sur lequel m'ont interrogé Véronique Louwagie, Éric Coquerel ou Boris Vallaud, épargnons-nous le manichéisme. J'ai largement développé dans mon rapport la question de la qualité de vie au travail et, partant, celle de la qualité des soins, puisque l'on sait combien la relation entre les soignants et les patients influe sur la qualité des soins. J'ai auditionné beaucoup d'aides-soignantes, d'infirmières, de directeurs d'établissements hospitaliers ou médico-sociaux pour approfondir cette question, et je considère qu'il n'est pas incompatible de dire qu'il y a, à l'hôpital, à la fois des problèmes d'organisation et des problèmes de ressources humaines, qu'il faut traiter les uns comme les autres.

En ce qui concerne en particulier les aides-soignantes, il y a un vrai problème d'attractivité de la profession, au point que les chefs d'établissement ont souvent du mal à recruter en CDI. En revanche, on trouve très facilement des aides-soignantes en intérim, car les contrats courts sont en effet pour elles une manière d'améliorer leur rémunération et de bénéficier d'une forme de flexibilité choisie. Quoi qu'il en soit, cette pénurie est l'une des raisons pour lesquelles la ministre a consenti des efforts importants pour les EHPAD, même s'il faudrait le faire encore davantage. J'ajoute enfin que la situation varie énormément selon les établissements, voire selon les services au sein d'un même établissement. Cela doit donc nous inciter à éviter les généralisations.

En ce qui concerne les retraités, Madame Louwagie, je veux bien qu'on continue à nous accuser de leur demander trop d'efforts, mais ça ne me semble pas à la hauteur du débat. Prenez un peu de hauteur et embrassez dans votre raisonnement les deux réformes précédentes, celle de 2010 et de 2014. Je rends à César ce qui est à César, et veux bien admettre que ce sont notamment les efforts décidés alors qui ont permis le retour à l'équilibre. Mais convenez que ces réformes ont pesé essentiellement sur les actifs. Je veux bien qu'on continue à tout demander aux actifs, qui ne savent d'ailleurs pas très bien où ils en seront dans vingt ou trente ans, et qu'on soit aux petits soins pour nos retraités, mais je rappelle que certains d'entre eux sont quand même dans des situations très confortables. Pour d'autres, c'est en effet difficile, et il ne faut pas mettre tout le monde dans le même panier, mais je trouve grossier de résumer notre politique comme vous le faites : il est vrai que, dans l'attente de la réforme structurelle à venir, nous sommes obligés de leur demander un effort supplémentaire, car le déficit va de nouveau se creuser en 2020 et 2021. Il s'agit de prendre des mesures d'urgence pour colmater les brèches. Et durant les dix années passées, ce sont les actifs qui ont supporté l'essentiel des réformes des retraites.

Pour agir sur le régime des retraites, on dispose de trois leviers : l'augmentation de la durée de cotisation, l'augmentation des cotisations, la maîtrise des dépenses et donc des pensions. En dix ans, nous aurons eu recours aux trois, et il est normal que chacun contribue à son tour.

Enfin, si on va jusqu'au bout de votre raisonnement sur le CICE, on peut considérer que les baisses de charge auraient dû être affectées sur l'année 2013, puisqu'il y a un décalage d'un an, voire de deux ou trois ans dans certains cas – ce que vous ne dites pas ; les baisses de charges ayant commencé en 2014, il est tout à fait logique que nous prenions cette année en considération à la fois le crédit d'impôt de 2018, qui s'applique en 2019, et la baisse des cotisations sociales. Nous aurions tout aussi bien pu n'enclencher cette baisse qu'à partir de 2020 et nous aurions eu 20 milliards de charges en moins pour les entreprises en 2019 et 20 milliards en moins en 2020. Nous avons préféré donner en 2019 un coup de pouce extrêmement important aux entreprises, et je pense qu'elles sauront en profiter.

J'en profite pour confirmer à Charles de Courson qu'en effet la transformation du CICE en abaissement de charges aura un effet sur l'IS, de l'ordre de 3 à 5 milliards d'euros, mais il ne faut pas oublier que la baisse générale des cotisations chômage autour du SMIC représentera un gain du même ordre.

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