Intervention de Olivier Véran

Réunion du mercredi 17 octobre 2018 à 9h35
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Véran, rapporteur général :

Ce n'est pas une proposition qui « sort du chapeau ». Elle s'inspire de plusieurs missions sur le financement des hôpitaux publics et des urgences, ainsi que de pratiques dans les pays voisins, où le nombre de patients admis aux urgences, contrairement à ce qui s'est passé en France, n'a pas augmenté de façon massive. C'est fort de ces observations et de ces discussions, depuis plusieurs années, que je fais cette proposition.

Je rappelle que j'ai interrogé la ministre de la santé la semaine dernière sur ce point. Elle a affirmé son soutien à cette proposition et souhaité qu'elle intervienne dans le cadre de ce débat. D'ailleurs, si cela n'avait pas été le cas, je n'aurais pas pu présenter cet amendement, qui aurait pu être considéré comme une dépense.

Jean-Louis Touraine, notamment, a expliqué que le patient devait être vu par un médecin. Cela sera bien sûr le cas, sauf lorsqu'un infirmier, peut-être en pratique avancée, pourra le recevoir dans un cadre protocolisé. Mais je n'imagine pas, pour avoir fait un paquet de gardes aux urgences, que l'on puisse conseiller à une personne se présentant aux urgences avec une douleur thoracique d'aller consulter le lendemain en ville. Nous parlons bien de la petite bobologie, de l'entorse bénigne qui ne nécessite pas de radiologie, de l'otite, de petites choses évidentes. Nous sommes à dix mille lieues, monsieur Vercamer, du drame survenu à Strasbourg où une femme se plaignant d'une douleur thoracique et disant au SAMU qu'elle se sentait mourir n'a pas été prise en charge.

Nous ne parlons pas des 23 millions de patients qui arrivent aux urgences, mais des 6 millions qui en sortent sans avoir reçu le moindre acte complémentaire. Le coût moyen d'un patient accueilli aux urgences s'élève à 161 euros. S'il présente une otite ou une entorse bénigne, cela représente une part de financement non négligeable pour l'hôpital. Très clairement, celui-ci n'est pas incité à renvoyer le patient vers une consultation de ville.

La réorientation ne consiste pas à mettre à la porte un patient. C'est une équipe aux urgences qui prend son téléphone, trouve un rendez-vous avec un médecin libéral ou à l'hôpital et remet ce rendez-vous de consultation au patient. Elle doit répondre précisément à sa demande, dans les délais nécessaires. C'est effectivement un travail de fond : le patient n'est certainement pas laissé à lui-même, encore moins à la rue.

Madame Bagarry, vous avez raison de dire que les hôpitaux de proximité n'ont pas de service d'urgence mais reçoivent des patients de façon spontanée. Il n'existe pas de tarification au forfait ou à l'activité aux urgences. Il me semble intéressant de réfléchir à adapter le modèle pour les hôpitaux de proximité, pour valoriser cette activité. Je vous propose que nous en discutions directement avec la ministre en séance.

Les tarifs ne sont pas fixés dans la loi. Les fédérations seront consultées pour la mise en place du dispositif. J'ai moi-même commencé cette concertation pour trouver le juste niveau de rémunération, faire en sorte qu'il n'y ait pas de perdant avec ce dispositif. Le texte prévoit que celui-ci sera évalué à échéance de deux ans, donc à très court terme, pour vérifier sa faisabilité, son efficacité, et les conséquences sur l'offre de soins urgents non programmés pour l'ensemble des patients.

Si vous en doutez encore, interrogez un urgentiste ou un médecin qui travaille dans une maison médicale de garde : il ne lui est pas naturel de dire à un patient qui ne nécessite pas une prise en charge d'aller à 300 mètres consulter un médecin. Le système actuel n'y incite pas du tout. Je m'adresse à la gauche : cette proposition, d'une certaine manière, permet de sortir du financement à l'activité aux urgences, qui est le système de financement le plus pervers que l'on puisse trouver, lié au financement à l'activité à l'hôpital.

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