Intervention de Marc Peschanski

Réunion du mardi 9 octobre 2018 à 17h00
Mission d'information sur la révision de la loi relative à la bioéthique

Marc Peschanski, directeur scientifique de l'Institut des cellules souches pour le traitement et l'étude des malades monogéniques (I-Stem) :

Les cellules souches embryonnaires humaines sont apparues dans le monde scientifique en 1998, ce qui veut dire que, depuis des années, aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Israël, mais également en Suède, en Espagne et en Belgique, des équipes de recherche travaillaient à isoler ces cellules souches embryonnaires. Je rappelle qu'en 1981 des cellules souches embryonnaires de souris avaient été identifiées et l'on savait donc qu'on allait en trouver chez l'homme.

De toute cette phase de recherche fondamentale, débutée dans les années quatre-vingt-dix et qui portait essentiellement sur les milieux de culture et les conditions de prélèvement, nos équipes ont été totalement exclues. Jusqu'à la fin 2004, quand il a enfin été possible de travailler ensemble sur les cellules souches, les seuls chercheurs à avoir pu acquérir des compétences dans son domaine sont ceux qui, comme Cécile Martinat, comme Laurent David ou moi-même, sont partis à l'étranger, dans des pays où les laboratoires avaient les autorisations nécessaires pour conduire des recherches sur les cellules souches embryonnaires.

Je corrigerai ici vos propos, monsieur le rapporteur : sous l'administration Bush, la recherche sur les cellules souches était effectivement financée par des fonds privés, mais elle ne se faisait pas en catimini, et l'université de Columbia avait d'ailleurs construit, de manière tout à fait officielle, en plein New York, un laboratoire spécifiquement dédié à la recherche embryonnaire sur les cellules souches mais qui ne bénéficiait pas des fonds fédéraux.

La France paie encore aujourd'hui le retard que nous avons pris alors et qui a empêché de nombreux techniciens, des ingénieurs, des thésards et des chercheurs de se former. Depuis 2005, nous essayons néanmoins de le rattraper, avec ce paradoxe qui ne manque pas d'étonner nos collègues étrangers, à savoir que notre retard était tel en matière de recherche fondamentale que nous avons concentré nos efforts sur la translation thérapeutique. Si bien que grâce aux travaux de M. Philippe Menasché, de Mme Anne-Lise Bennaceur-Griscelli ou des chercheurs de l'I-Stem, qui se sont appuyés sur les avancées étrangères, la France se trouve à la pointe de la thérapie cellulaire et de la modélisation pathologique : Philippe Menasché a déjà à son actif un essai complet, tandis que l'I-Stem a lancé une procédure de demande d'autorisation pour réaliser son premier essai de thérapie cellulaire.

Il y a donc aujourd'hui en France beaucoup moins d'équipes qui se consacrent aux cellules souches qu'en Grande-Bretagne, en Israël, en Belgique, aux États-Unis ou en Espagne, mais nous occupons dans la recherche translationnelle et le passage à la clinique une position avancée que nous voulons conserver. La révision des lois de bioéthique doit donc être l'occasion de nous donner les moyens d'aller jusqu'à la découverte de médicaments ou de traitements permettant de soigner les patients. Il est clair en effet que, d'ici la prochaine révision, dans sept ans, si les résultats de M. Peter Coffey, à Londres, se vérifient – et il n'y a aucune raison que cela ne soit pas le cas –, la recherche aura débouché sur la mise à disposition de nouveaux traitements sur le marché.

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