Intervention de Marie Msika Razon

Réunion du mardi 16 octobre 2018 à 11h50
Mission d'information sur la révision de la loi relative à la bioéthique

Marie Msika Razon, médecin au Planning familial :

Pour le moment, nos patientes se rendent à l'étranger pour faire conserver leurs ovocytes : elles sont souvent en fin de période de fertilité, toujours en prise à ce fort désir d'enfant. On peut imaginer que cette procédure, si elle était prise en charge, codifiée et ouverte à toutes, serait perçue différemment par la société. Je ne pense pas que l'ensemble des femmes souhaitent disposer d'un stock ovocytaire pour « le jour où », et je ne crois pas non plus que les motifs conduisant à retarder la maternité soient liés à des pressions professionnelles – les parcours de vie sont complexes, parfois différents de ce que l'on voudrait qu'ils soient. Je suis plutôt optimiste et je pense que la demande d'accès à cette technique sera limitée.

Mais l'autoconservation ovocytaire est aussi un moyen d'améliorer l'accès au don d'ovocytes, très limité en France. La pénurie actuelle fait que les couples hétérosexuels qui en ont les moyens se rendent à l'étranger pour être pris en charge plus rapidement, l'attente étant d'environ trois ans en France, contre six mois en Espagne. Si l'on pouvait faciliter la démarche d'autoconservation et inviter les femmes à donner les ovocytes qu'elles ne souhaitent pas utiliser, on améliorerait l'accès au don pour les couples demandeurs d'une grossesse.

Il est triste de recevoir des patientes qui ont eu recours à des PMA sauvages et pris des risques infectieux – on peut récupérer sur internet on ne sait quoi, on ne sait trop d'où –, alors que nous avons la chance de pouvoir leur offrir un cadre sanitaire fiable et sûr. Les médecins, membres du Planning, veulent que toutes les femmes puissent bénéficier d'un système de soins égalitaire et de qualité.

S'agissant du coût d'une telle mesure, d'une part je ne suis pas certaine que les demandes seront si nombreuses, d'autre part on peut imaginer que cela allégera, par un système de vases communicants, le coût de la PMA. Les femmes dans la quarantaine doivent recourir à un don d'ovocytes ou subir des PMA difficiles, parce que leurs ovocytes sont de mauvaise qualité. Si les femmes désireuses d'enfant – c'est en général clair dans leur esprit – faisaient très tôt la démarche de préserver leurs ovocytes, les PMA auxquelles elles pourraient recourir plus tard seraient moins lourdes médicalement, plus faciles à réaliser, avec de meilleurs taux de réussite. Je ne suis pas économiste, mais je pense que les frais de santé pourraient s'en trouver équilibrés. Il serait intéressant de mener cette réflexion.

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