Le cancer du surencombrement des prisons, phénomène compliqué, appelle plusieurs thérapeutiques : constructions et rénovations de places de détention mais aussi une autre philosophie pénale conçue pour redonner de la visibilité au dispositif pénal. Pour les peines encore dites alternatives à l'emprisonnement, il faut des réponses concrètes. La loi pénitentiaire dispose que l'emprisonnement est le recours ultime pour le magistrat et que, dès lors qu'il y a recours sans l'assortir du sursis, il doit immédiatement envisager l'aménagement de peine ; ce n'est pas cohérent, mais c'est ainsi. Le fait est que pour un certain nombre de personnes, passer quelques mois à la prison de Fresnes ne règle rien et illustre a contrario le fait qu'il faut donner aux administrations compétentes les moyens et la visibilité permettant d'organiser l'exécution des peines en milieu ouvert avec des aménagements de peine. J'ai vraiment du mal à comprendre que quelques dizaines de places soient vacantes dans les quartiers de semi-liberté de Versailles et Bois-d'Arcy alors que le ressort compte plus de 9 000 condamnés.
Des solutions de bon sens existent, qui supposent la mobilisation de la justice et d'autres acteurs. M. le préfet du Val-de-Marne, très impliqué dans ces questions, considère que les TIG donnent un sens à la peine. Comme il l'a fait lorsqu'il était en fonctions à la Martinique, il a développé des postes de TIG dans sa résidence, à la préfecture, il a convoqué les chefs des services de l'État – dont on constate qu'ils sont très peu pourvoyeurs de postes de TIG – et les maires. Le résultat de tout cela a été que le nombre de postes de TIG, qui stagne dans l'inter-région, a augmenté de 10 % en un an dans le département. C'est dire qu'indépendamment des réformes législatives, le volontarisme a des effets tangibles.
Les détenus radicalisés étant pour l'instant encore prévenus, leurs sorties sont encore en nombre marginal. Quand ils sont condamnés, ils exécutent leur peine seuls en cellule et un accompagnement professionnel adapté leur permet de travailler sur la sortie de cette idéologie mortifère. Les individus radicalisés ont des profils extrêmement variés – certains présentent des troubles psychiatriques, d'autres des problèmes d'insertion dans la société, d'autres sont des prosélytes – et des réponses adaptées à chacun sont nécessaires. Toute sortie est actuellement préparée au quartier d'évaluation de la radicalisation, et en prison ordinaire par une évaluation. La difficulté tient aux sorties brutales – lorsqu'un détenu sort, par exemple, un vendredi à 15 heures, qu'il bénéficie d'une libération sèche ou d'un suivi par le SPIP. Dans le second cas, la transmission à ce service des informations le concernant est immédiate ; il est alors convoqué la semaine suivant sa sortie et, lorsque le détenu est fiché pour terrorisme, les services de renseignement sont immédiatement alertés. La solution idéale consisterait en des dispositifs d'aménagement de peine très fortement contrôlés pour éviter des sorties de détention brutales. Mais, même si la contrainte imposée est très serrée, il y a une très forte réticence à instituer des aménagements de peine pour ces détenus en particulier ; cela peut se comprendre, car si jamais une récidive a lieu, elle sera très difficile à expliquer – alors même que la probabilité d'une récidive est plus grande si la sortie est sèche.