– Nous avons été saisis par les commissions des affaires économiques et des affaires européennes de l'Assemblée nationale sur la question de la confiance que l'on peut placer dans les expertises scientifiques. Ce sujet polémique est d'actualité, mais nous allons essayer de le rendre moins brûlant, car il est indispensable d'évaluer sereinement la qualité de l'expertise des risques sanitaires et environnementaux. Grâce à l'état de la connaissance scientifique, nous pouvons mieux évaluer ces risques, mais aussi fournir une meilleure information à nos concitoyens et donner aux collectivités publiques, aux États, à l'Union européenne, des structures qui permettent de remettre l'église – ou plutôt la mairie, pour respecter le principe de laïcité – au milieu du village…
Nous recevons aujourd'hui des représentants de deux agences d'évaluation, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) et l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA). Plus le nombre d'organismes d'évaluation augmente, et plus le doute dans l'opinion grandit : l'apport d'informations multiples suscite automatiquement des contre-expertises, mais il vaut mieux que le débat ait lieu plutôt que de fonctionner en vase clos. Pour lever toute défiance envers les expertises, chacun doit savoir comment et sur quels principes travaillent ces organismes. Pour savoir si la situation peut être améliorée, il nous faut donner la parole aux experts, aux scientifiques, aux universitaires, mais aussi aux industriels.
En dépit du climat extrêmement tendu, leurs réponses sont importantes et participent de la richesse du débat. Toutefois, cela engendre parfois de la confusion. Le glyphosate, par exemple, est cancérigène pour le Centre international de recherche sur le cancer, mais pas pour l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et l'ANSES. On observe même un marché noir du glyphosate et du Roundup, cette solution étant relativement efficace pour ceux qui vivent dans les régions frontalières. Le rôle de l'Office parlementaire est de prévenir le désastre collectif qui pourrait résulter de la somme des satisfactions individuelles.
Les commissions des affaires économiques et européennes nous ont interrogés à l'origine sur l'indépendance et l'impartialité des agences européennes d'évaluation. Nous avons alors décidé, sans aucun préjugé, d'élargir le sujet sur les processus qu'elles utilisent et sur leurs façons de travailler. Nous n'avons pas à nous ériger en justiciers, même si notre devoir est évidemment de souligner les éventuelles imperfections des dispositifs d'évaluation. Pour être un parlementaire ancien et pour connaître le calvaire des collectivités locales en matière de normes, je puis vous dire que, plus la science progresse, plus les normes et les exigences deviennent fortes, jusqu'à la perfection. Il convient néanmoins de garder un certain recul par rapport à l'évolution des méthodes d'évaluation et les analyses transmises par les uns ou les autres. « Le vin est la plus hygiénique des boissons » disait Pasteur. Cela était sans doute vrai lorsque l'eau était à l'origine de la plupart des affections. Heureusement, ce n'est plus le cas. Par conséquent, je vous incite à considérer que, sauf exception, l'évaluation est une réalité mouvante et que les appréhensions liées à la sécurité peuvent parfois être utilisées à mauvais escient.