Intervention de Katia Baumgartner

Réunion du jeudi 11 octobre 2018 à 9h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Katia Baumgartner, membre du réseau santé-environnement de France Nature Environnement :

– Merci, en me donnant la parole, de permettre aux citoyens de s'exprimer.

France Nature Environnement, qui fête ses 50 ans cette année, est une fédération comprenant un peu plus de 3 500 associations et 14 fédérations nationales. Nous représentons des milliers de personnes préoccupées par les questions de santé, d'environnement et de biodiversité. Nous comptons 16 réseaux thématiques et nous sommes impliqués notamment au sein du Bureau européen de l'environnement et d'autres associations internationales. Nous sommes donc la troisième plus grande fédération de France, après celle du sport et celle de la chasse. Nous sommes également très investis auprès des agences sanitaires.

Nous ne sommes pas arc-boutés sur des positions de principe ou dogmatiques, nous privilégions au contraire la concertation, le dialogue et l'expertise, ce qui ne nous empêche évidemment pas, le cas échéant, d'exprimer nos désaccords. Nous avons des représentants au conseil d'administration de l'ANSES. Je suis moi-même administrateur à Santé publique France. Notre rôle est de porter la parole citoyenne pour faire avancer le débat.

M. Boullier a abordé un certain nombre de points que j'aurais pu évoquer. Nous faisons les mêmes observations.

Nous sommes très sollicités à différents niveaux, soit par des associations concernant des dossiers locaux, soit par des citoyens, qui ne sont pas forcément des adhérents de France Nature Environnement, mais qui sont à la recherche d'informations. La grande difficulté pour eux est de trouver la bonne information au bon endroit et de lui faire confiance. On trouve tout et n'importe quoi sur internet !

La crise de confiance est réelle. Certains citoyens mettent en doute les données des experts et des industriels. Nous le voyons lorsque nous participons à des formations universitaires ou aux formations citoyennes que nous organisons dans les écoles et les lycées sur l'environnement au sens large : ils pensent que les agences ne sont pas indépendantes, qu'elles sont inféodées, qu'il y a des collusions d'intérêts.

Il nous faut travailler sur la clarté des messages. Nous nous appuyons sur les expertises, mais celles-ci ont certaines limites. Nous cherchons à adopter une vision équilibrée dans nos plaidoyers.

La crise de l'expertise n'est pas qu'une crise de déontologie, c'est aussi le fait d'un manque de moyens. Pour gagner en confiance, pour être réactifs et faire évoluer les protocoles, les agences ont besoin de moyens. Or on voit bien que les scientifiques sont plus souvent occupés par la course aux financements que par leurs recherches.

Il faut développer la recherche, les nouveaux protocoles. Sur les perturbateurs endocriniens, on ne peut plus utiliser les mêmes paradigmes. Les agences ont besoin de nouvelles modélisations. Il faut écouter le terrain. Ce sont les naturalistes, il y a quarante ou cinquante ans, qui ont été les premiers lanceurs d'alerte sur les effets des perturbateurs endocriniens sur la faune et sur la flore. Il est donc important de donner la parole – comme vous le faites aujourd'hui – aux observateurs de terrain qui forment notre réseau. Les citoyens attendent que nous soyons écoutés.

Dernier point – comment l'aborder sans heurter les industriels ? Lorsque l'on met à disposition des données, tout dépend de leur communication, de leur matérialisation par un graphique. Un résumé ne donne pas le contenu exact d'une étude… J'ai participé à des choix de marchés de détergents-désinfectants dans les hôpitaux, je sais que deux concurrents peuvent respecter la norme EN 1275 de manière très différente… Certains industriels peuvent volontairement omettre certaines informations. Les citoyens expriment un doute sur ces manières de présenter les résultats des études et sur la complétude des données communiquées.

Au sujet des perturbateurs endocriniens, des citoyens nous ont signalé le très beau site internet de l'industrie chimique sur le sujet, mais celui-ci minimise certains risques et fausse l'information.

Dans les universités, dans les groupes de travail, lorsque nous répondons à des enquêtes publiques, nous participons à la formation et à l'éducation. Les gens doivent acquérir les outils de sélection de l'information.

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