Intervention de François Jolivet

Réunion du mardi 30 octobre 2018 à 17h25
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Jolivet, rapporteur spécial (Logement et hébergement d'urgence) :

La question de Stella Dupont constituera pour moi l'occasion d'évoquer l'amendement de Mme Vignon qui viendra en discussion tout à l'heure.

Le Gouvernement a effectivement décidé de rassembler les tarifications par familles homogènes : victimes de violences conjugales, mineurs isolés, majeurs isolés sans logement, personnes sorties de centres psychothérapiques, etc.

Il est vrai que le ministère et la direction du budget ont décidé de réduire de 13,4 millions d'euros le financement des associations. Nous ne disposons évidemment pas, à ce stade, de retours sur expérience, mais les associations gestionnaires nous ont demandé si ces dotations étaient diminuées parce qu'elles faisaient mal leur travail.

Il faut considérer cette diminution de budget en prenant de la hauteur, sans limiter notre réflexion au point de vue des seuls destinataires, à savoir les associations. L'essentiel des crédits du programme 177 va à l'hébergement en hôtel, ce qui, en région parisienne, représente 80 euros par nuitée pour une durée moyenne de dix-huit mois ! Cela signifie que tout le dispositif « Logement d'abord », qui va de l'accueil d'urgence au logement, a certes sa logique interne, mais que des économies peuvent probablement être réalisées afin de redéployer ses ressources vers les associations.

Je tiens à souligner que le programme 177 est le réceptacle budgétaire de tout ce qui ne va pas dans notre pays, et que certains ministères qui devraient concourir ne le font pas. Les résidents des CHRS sont, pour 30 % à 40 % d'après les associations, des personnes qui ont des problèmes psychiatriques ; or il n'existe pas de suivi psychiatrique ambulatoire dans notre pays. C'est donc sur le prix de journée que l'association doit financer le recrutement d'un éducateur « psy » pour assurer le suivi psychiatrique des personnes hébergées en CHRS, et peut être demain dans des pensions de famille – et cela avant qu'elles puissent à un logement puisqu'elles le font par étapes, à la différence de familles expulsées qui en retrouvent un, ou de familles migrantes qui pourraient être directement logées puisqu'elles n'ont pas connu la rue si ce n'est la transhumance qu'elles ont vécue avant d'arriver chez nous.

Aujourd'hui, les agences régionales de santé (ARS) sont absentes, et il me paraît anormal que les associations aient à inclure dans le prix de journée le suivi psychologique des personnes qui résident dans ces ensembles. Les ministères chargés de la solidarité et de la santé, notamment par le truchement des ARS, devraient prendre en compte la situation pathologique des personnes hébergées dans les CHRS. Ces administrations s'intéressent au taux de sortie des centres prenant en charge les troubles psychologiques, mais, ensuite, la « patate chaude » est passée aux associations et au budget du programme 177, ce qui me paraît très anormal.

À Mme Louwagie, je confirme que les dépenses fiscales de la politique du logement ne sont pas évaluées. Pour reprendre les propos du rapporteur général, je pense que cette évaluation n'est faite par personne et qu'aucun ministère ne s'en considère comme responsable. Ces dépenses fiscales représentent plus de 15 milliards d'euros dans notre budget ; il est inadmissible que les statistiques relatives à leur utilisation ne soient pas établies.

Le budget de l'ANRU est passé de 5 à 10 milliards d'euros, grâce à une participation d'Action Logement, à une participation de l'État de 1 milliard d'euros et à 2 milliards d'euros prélevés par la CGLLS, c'est-à-dire par les organismes d'HLM, qui les reversent. L'accord du 11 juillet dernier était inespéré, mais le relèvement des seuils d'exonération de la participation des employeurs à l'effort de construction, ou « 1 % logement », que prévoit le projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises, dit « PACTE », a privé Action Logement de ressources. En compensation, une surtaxe sur les polices d'assurance dommage-ouvrage a été créée ; nous verrons bien si cela tient debout. Désormais, la capacité d'engagement s'élève à 10 milliards d'euros, et à cette heure 80 dossiers, concernant principalement la région parisienne, ont été instruits pour un montant de près de 2 milliards d'euros ; cet argent est bien consacré au logement social.

Enfin, l'expression « logements abandonnés » n'est pas appropriée. Le problème que j'évoquais est celui de certains bailleurs dont personne ne voudra, et qui ne pourront pas survivre tout seuls. Il appartient à l'État – et j'en ai saisi le Gouvernement – de trouver des dispositifs afin que leurs locataires bénéficient d'une gestion régulière de leur immeuble et d'une bonne qualité de service.

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