Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, chers collègues, le 17 octobre sur France Inter, Mme la ministre Jacqueline Gourault affirmait que le Gouvernement avait arrêté de baisser les dotations allouées aux collectivités territoriales. En fait, lorsque l'on analyse en détail ce budget, on constate que la mission « Relations avec les collectivités territoriales » est amputée en gros de 228 millions d'euros par rapport à 2018.
Les chiffres avancés par le Gouvernement ne prennent en compte ni l'augmentation de la population ni l'inflation pour l'année 2019 : ce sont pourtant des données qui sont essentielles pour connaître le montant réel que les collectivités territoriales vont percevoir. Par exemple la dotation de soutien à l'investissement local baisse de 25,5 %. Les dotations générales de décentralisation et la dotation globale de fonctionnement diminuent également.
Face à ces données, vous nous répondez qu'il y a « péréquation verticale ». Il est vrai que celle-ci augmente de 190 millions, mais ce montant ne couvre même pas la baisse de la mission, qui est de 228 millions d'euros. Surtout cette somme vient en partie des 145 millions de baisse de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, prévue à l'article 23 de votre budget.
Au final, il y a bien une diminution des budgets pour les collectivités territoriales. Ces diminutions ne sont pas des nouveautés : les gouvernements successifs sabrent d'année en année les budgets pour nos territoires. La dotation globale de fonctionnement en 2008 s'élevait à 40 milliards d'euros ; en 2018 elle n'était plus que 27 milliards, soit une diminution de 13 milliards en dix ans. Votre gouvernement fixait du reste dans sa loi de programmation des finances 2018-2022 une nouvelle diminution de 13 milliards d'euros.
L'innovation que vous proposez, c'est la mise en place de « contrats de maîtrise de la dépense publique », qui sont en réalité des « contrats d'austérité ». Cette mesure impose à plus de 300 collectivités d'appliquer l'austérité budgétaire sur leur territoire. Vous nous direz certainement qu'elles l'ont accepté, je vous répondrai que c'est le couteau sous la gorge.
Pour celles qui dépasseraient les seuils prévus, la sanction est considérable, puisque l'amende est de 75 % de l'écart entre le seuil et la réalité de la dépense, et jusqu'à 100 % pour celle qui ne signent pas ce fameux contrat, ce qui remet en cause au passage le principe constitutionnel de la libre administration des collectivités.
Votre méthode n'est pas clairement explicitée mais ce que vous imposez, ce sont d'une part des restrictions budgétaires camouflées dans des détails techniques et d'autre part des contrats d'austérité.
Nos concitoyens sont directement touchés par ces mesures austéritaires. En tant que bénéficiaires des services publics, ils sont victimes de ces diminutions de budget, au niveau par exemple de la culture, du sport ou de l'éducation, ce qui se traduit dans certaines collectivités par la remise en cause du financement de places en crèches ou d'associations par exemple. Dans d'autres collectivités ce sont les travaux de construction ou de rénovation des infrastructures qui sont repoussés.
Les agents et employés des collectivités sont affectés de diverses manières. Ils subissent une surcharge de travail, liée à la diminution d'effectifs par suppressions de postes ou départs à la retraite non remplacés. Ils subissent des restrictions par rapport au déroulement de leurs carrières et plus globalement ils subissent la remise en cause de leurs statuts.
La détérioration des conditions de travail impacte également la qualité des services que sont en droit d'attendre les usagers. La méthode employée est classique : après une asphyxie financière d'un service public, ce qui induit une dégradation de ce service qui n'est plus en capacité de répondre aux besoins des populations, on dit que le service public ne fonctionne pas, que les usagers ne sont pas satisfaits et donc qu'il faut changer de modèle. En gros, cela revient à concrétiser l'expression « qui veut noyer son chien l'accuse de la rage ».
Dans le cadre du présent budget, nous proposons de modifier les critères du fonds national de péréquation pour les communes. Nous pensons qu'il est important de prendre en compte le revenu médian, et non pas uniquement le revenu moyen, afin de mieux répondre aux inégalités territoriales. Nous pensons également que des rapports d'informations sont plus que nécessaires. Ils permettraient d'évaluer précisément les compensations de l'État liées aux transferts de compétences et aux suppressions de taxes locales. Il faut aussi évaluer les conséquences des réductions budgétaires sur la qualité des services que la population est en droit d'exiger.
Dans notre contre-budget, nous proposons d'augmenter la dotation globale de fonctionnement de 467 millions cette année, pour au moins compenser les baisses annuelles. Plus largement nous pensons qu'il est indispensable de redéployer les services publics sur nos territoires en imposant un moratoire sur leurs fermetures dans les territoires ruraux et périurbains.