Madame la ministre, voilà dix-huit mois que vous êtes en charge de la politique de l'emploi et, en dépit de votre exhortation à « avoir confiance », on ne peut pas dire que vous nous ayez donné beaucoup de motifs d'espérer. Ce n'est pas les paupières lourdes mais, au contraire, les yeux bien ouverts que nous considérons la situation, à commencer par les chiffres de l'emploi, qui donnent le sentiment que vos réformes sont un peu vaines et que vous avez baissé la garde. Ce n'est pas parce que le Gouvernement n'en parle jamais que les Français n'y pensent pas toujours. Les chiffres du chômage ne sont pas bons : on relève 22 000 chômeurs en plus, toutes catégories confondues, depuis un an. Peut-être cela a-t-il à voir avec le gigantesque plan social provoqué par la suppression des 250 000 emplois aidés. Votre aveuglement idéologique vous a fait préférer de vrais chômeurs à ce que vous teniez à tort pour de « faux » emplois. Les emplois aidés manquent à l'éducation nationale, aux EHPAD – établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes – et, plus cruellement encore, aux associations, qui ont perdu, par votre choix, 40 000 emplois et l'équivalent de 1 milliard d'euros de subventions.
Pour toute réponse à nos interpellations, vous nous avez enjoint d'espérer du nouveau parcours emploi compétences. Or, aujourd'hui, force est de constater que c'est un échec. À peine plus de la moitié des parcours ont été prescrits en 2018, et vous ne prévoyez que 100 000 contrats supplémentaires en 2019, alors qu'il y a un an, vous évoquiez le chiffre de 200 000. Cet échec était prévisible : le taux de prise en charge par l'État est trop faible, l'obligation de formation n'est pas financée et vous avez perdu la confiance de nombre d'employeurs, qui redoutent un nouveau revirement de votre part.
En réformant en toute hâte les contrats aidés, vous avez prétendu vouloir privilégier le qualitatif au quantitatif. Finalement, nous n'avons ni l'un, ni l'autre, et votre recentrage sur les publics prioritaires révèle en réalité votre aspiration à un État social minimal. Nous aurions dû soutenir avec la même ferveur les emplois francs qui, de la même manière, peinent à démarrer.
On aurait pu espérer que votre budget 2019 prenne en considération le rappel à l'ordre que vous infligent les faits, mais il n'en est rien. Après une baisse de 1,5 milliard d'euros en 2018, le budget alloué aux politiques de l'emploi en 2019 sera, à périmètre constant, en baisse de plus de 2 milliards d'euros. Cette réduction des budgets frappe d'abord durement les opérateurs de l'emploi en dépit de la priorité que vous prétendez donner à l'accompagnement des demandeurs d'emploi. Pôle emploi, acteur majeur s'il en est, perdra ainsi, 800 postes en 2019, après la suppression de 600 postes et de 1 300 contrats aidés en 2018. Votre propre ministère rend 239 postes. Les missions locales verront, pour leur part, leur subvention baisser de plus de 8 millions d'euros, alors que le Gouvernement souhaite quintupler le nombre de garanties jeunes.