Je considère comme mon collègue que l'essentiel est la pédagogie au plus près des gens. Voyez-vous, monsieur le rapporteur, quelques mois après que votre amendement a été adopté, j'ai tenu un stand d'information, et chacun disait vouloir être donneur ; mais quand on commence à expliquer comme les choses se passent, tout devient plus compliqué : « Ah oui, on aimerait bien être donneur, mais on ne pensait pas que c'était tout à fait comme ça… » Des campagnes d'explication ont été faites, mais elles n'étaient pas à la portée de tout le monde. La pédagogie, encore et encore, est indispensable.
D'autre part, nous sommes préoccupés par l'origine, très peu claire, des tissus, des os et de la peau importés on ne sait d'où. Des éclaircissements sont nécessaires pour faire de la communication sur le don d'organes. Alors que 22 000 personnes sont en attente d'un greffon en France, on sait très bien que l'on ne comblera jamais cette attente ni par des dons post mortem français ni par des dons de sources Maastricht II et Maastricht III. Quant aux dons faits du vivant du donneur, ils ne concernent pas tous les organes et l'opération comporte des risques, aussi bien pour le donneur que pour le receveur. Ce n'est pas rien de recevoir un organe d'un membre de sa famille – cela pose même de redoutables problèmes psychologiques, dont je vous donnerai un exemple. À l'association charentaise où je me trouvais il y a quinze jours, un homme qui a donné une partie de son foie à son père il y a quinze ans a pris la parole pour dire : « Je ne devrais pas être là », ce qui a déconcerté tout le monde. Après quoi, il a ajouté : « Quand j'ai donné une partie de mon foie à mon père, j'avais trente ans, j'étais célibataire et insouciant. Maintenant, je suis marié, j'ai un petit garçon, et que se passera-t-il s'il a besoin de mon foie ? ». Cela a donné à réfléchir à tous les présents.
Les donneurs vivants sont des sources de greffons et le citoyen est généreux, mais il y a une limite à la générosité. J'observe enfin que l'on ne parle plus de « dons » mais de « prélèvements ». J'aimerais que l'on en revienne au mot « don » : pour qu'il y ait prélèvement, il a bien fallu qu'il y ait un don !