Par notre amendement CL765, nous souhaitons supprimer l'article 31 bis ajouté par le Sénat dans le but de renforcer la présence de l'avocat aux côtés de la victime, depuis le recueil de la plainte jusqu'à l'aboutissement de la procédure.
L'avocat joue déjà un rôle déterminant dans l'accompagnement des victimes. Je voudrais vous en parler en tant que praticienne. Pour avoir accompagné de nombreuses victimes, je crois que l'intention du Sénat est bonne mais que la mesure ne produira pas les effets espérés. Tout en jouant son rôle d'accompagnement et de conseil, l'avocat n'est pas forcément aux côtés de la victime lors du dépôt de plainte. Il peut, par exemple, saisir directement le procureur. Dans tout ce cheminement qui aboutit au dépôt de la plainte, et qui prend beaucoup de temps, la victime est d'ailleurs souvent soutenue par des associations.
Un aspect de l'analyse du Sénat me dérange un peu : il est établi un parallèle entre la présence de l'avocat aux côtés du gardé à vue et sa présence aux côtés de la victime. Ce n'est pas du tout la même approche. Quand il assiste un gardé à vue, l'avocat veille au respect de la procédure parce que son client fait l'objet d'une mesure privative de liberté. À ce stade, l'avocat n'a pas accès à tout le dossier ; il ne peut pas intervenir sur le fond ; il est plutôt un garant supplémentaire du respect de la forme.
La victime, quant à elle, ne fait pas l'objet d'une mesure privative de liberté. Quand sa plainte aura pris une tournure judiciaire, elle pourra apporter tous les éléments qu'elle veut. Si sa plainte ne prospère pas, elle peut se constituer partie civile, par l'intermédiaire de son avocat, et avoir accès à toutes les informations contenues dans le dossier. Elle dispose alors des informations nécessaires pour engager, si elle le souhaite, une procédure.
Enfin, si l'on doit appeler un avocat pour chaque audition, cela risque de ralentir les procédures. Au moment des confrontations, le plus difficile pour une victime, l'avocat est à ses côtés. Le dispositif prévu par le Sénat n'ajouterait rien, en pratique, à l'accompagnement des victimes.