Tout le monde a bien travaillé. Quoi qu'il en soit, vous serez pleinement associés aux conclusions qui seront tirées de ces États généraux.
En ce qui concerne le choix des présidents d'ateliers, nous avons fait dans la dentelle. Le choix des patrons de Danone et de Système U pour piloter l'un des ateliers a été fait pour une simple et bonne raison : ce sont deux chefs d'entreprises importantes qui avaient contractualisé avec des producteurs et qui s'étaient engagés publiquement, contrairement à d'autres, à traiter la question du revenu des agriculteurs, notamment dans la filière laitière. Voilà pourquoi il nous a semblé intéressant qu'un distributeur et un transformateur qui sont des donneurs d'ordres importants dans notre secteur économique soient ainsi invités à animer un groupe de travail, non pour imposer un débat ou orienter des conclusions au mieux de leurs propres intérêts. Car personne ne nous imposera quoi que ce soit : lorsque les ateliers seront terminés, le choix appartiendra à ceux qui sont en responsabilité, c'est-à-dire au politique. Les discussions ont été très ouvertes et les ateliers se sont plutôt bien passés ; c'est en tout cas ce qui m'a été rapporté.
Pour ce qui est des modèles agricoles, je vous répète ce que j'ai dit tout à l'heure : je ne veux pas les opposer les uns aux autres. Ils sont complémentaires parce qu'ils correspondent à des philosophies et à des marchés spécifiques.
Monsieur Jean-Bernard Sempastous, nous n'avons pas interrompu les aides au maintien de l'agriculture biologique. J'entends bien cette petite musique qui circule : « l'État arrête de financer l'agriculture bio ». Nous sommes cohérents, d'autant plus que le Président de la République nous a assigné une série d'objectifs précis dans ce domaine, à commencer par celui d'atteindre 50 % de produits biologiques, écologiques ou locaux, autrement dit issus de filières courtes, dans la restauration collective à l'horizon 2022. Le deuxième : passer de 6 à 8 % du territoire cultivé en bio. Bel objectif !
Vous me répondrez que nous pourrions être un peu plus ambitieux – certains me l'ont dit. Mais faisons déjà les efforts et le nécessaire pour atteindre ces 8 % – je suis sûr que l'on y parviendra –, et s'il est possible d'aller plus loin, nous le ferons. Mieux vaut un objectif soutenable qu'un objectif de 15 %, dont nous serions loin dans trois ans : on ne manquerait pas de venir nous le reprocher. À l'inverse, je sais que nous serons capables d'atteindre ces 8 %.
Pour autant, l'État doit prendre ses responsabilités. Je me suis retrouvé devant une impasse budgétaire de 853 millions d'euros. Si j'avais pris une décision purement budgétaire, qu'aurais-je dû faire ? J'aurais tout simplement dû suspendre le financement de l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN), de l'assurance récolte et des aides à l'agriculture bio, car je n'avais plus les crédits nécessaires. Pourtant, j'ai choisi de faire un prélèvement de 4,2 % sur les crédits du premier pilier de la politique agricole commune (PAC) vers le deuxième pilier. Ce sont donc les agriculteurs qui dépendent des aides à l'hectare et du « Pilier 1 » qui ne sont pas contents. Ils me l'ont fait savoir, à raison, estimant qu'on a ponctionné leurs aides pour financer le deuxième pilier. Mais je n'avais pas d'autre choix que de le faire si je voulais assurer le financement de l'ICHN – et donc soutenir les zones en difficulté et les élevages de montagne notamment –, de l'assurance récolte, sur laquelle nous travaillons, puis de l'agriculture bio, et notamment de la conversion.
En effet, c'est sur la conversion que l'État doit être présent. Nous sommes parallèlement en cours de discussion avec les régions sur l'aide au maintien et la manière dont nous allons répartir ce surplus. Les régions ont ensuite le choix de financer – ou pas – l'aide au maintien. Certaines ont déjà pris leur décision ; plusieurs d'entre elles ont décidé de plafonner les aides, d'autres pas. C'est la liberté d'administration des collectivités territoriales : elles feront ce qu'elles voudront de cet argent.
Je voudrais rajouter que nous avons obtenu la prolongation en 2018 du crédit d'impôt qui devait s'arrêter au 31 décembre 2017. Ce crédit d'impôt ne représente certes pas une subvention, mais c'est de l'argent que les producteurs ne dépensent pas, ce qui leur redonne du pouvoir d'achat et de la compétitivité. Et cela peut représenter des sommes importantes.
Vous le voyez, sur l'agriculture bio, l'État ne renonce à aucun de ses engagements. Sur la période 2014-2020, les aides publiques nationales pour les agriculteurs bio sont trois fois plus importantes que sur la période 2006-2013 ; elles représentent 85 millions d'euros. On ne peut donc pas dire que nous n'aidons plus l'agriculture biologique : au contraire, nous investissons des sommes non négligeables ; le crédit d'impôt passera dans la loi de finances rectificative ; nous préservons l'aide au maintien. Autant de moyens qui permettront de répondre aux objectifs assignés par le Président de la République.
Les choses sont claires, cela fait cinq ou six fois que je le dis. Mais certains s'obstinent à soutenir que ce n'est pas vrai. Je vais employer la pédagogie du clou : il faut taper dessus pour que cela entre !