Intervention de Caroline Abadie

Séance en hémicycle du lundi 19 novembre 2018 à 21h30
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCaroline Abadie :

Le présent texte porte en lui toute l'ambition de notre politique. Loin des postures idéologiques, il a trouvé sa voie, sur une ligne d'équilibre : son objectif est de simplifier les procédures civiles et pénales pour une plus grande célérité de la justice, au profit de nos concitoyens. Avec une augmentation de son budget de 25 % sur le quinquennat, la justice française doit sortir de sa grande pauvreté, rattraper ses retards et se projeter, enfin, dans ce XXIe siècle numérique.

Parmi toutes les ambitions de ce texte, j'en retiendrai deux.

La première concerne les 800 000 majeurs protégés. Mme Caron-Déglise, avocate générale à la Cour de cassation vous a proposé récemment, madame la garde des sceaux, des évolutions de la protection juridique des personnes. Pour reprendre une expression employée dans son rapport, l'époque n'est plus à la « mort civile » des majeurs protégés, qui ne peuvent plus, dès lors, participer à la société. La protection de leurs intérêts ne peut plus se faire au sacrifice de leurs droits fondamentaux : mariage, PACS, divorce, accès aux soins, droit de vote, droits successoraux sont autant de droits qui exigent les interventions cumulées du juge et du tuteur, ce qui délaye dans le temps l'exercice des droits, portant ainsi atteinte à leur effectivité.

C'est en commission que nous avons pu ensemble, Gouvernement et majorité, introduire ces droits, à l'article 8, ce que le Sénat avait refusé de faire. En vertu des principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité, ils ne peuvent plus être retirés aux majeurs protégés. Désormais, à la protection de l'intérêt, supérieur et objectif, de la personne vulnérable se substitue le respect de ses choix et préférences. C'est ce qu'avait souhaité le Défenseur des droits dans son rapport de septembre 2016 ; c'est ce qu'exigeaient nos engagements internationaux.

Cette avancée est donc un motif de grande fierté pour le groupe La République en Marche. En contrepartie, la personne chargée de la mesure de protection voit son rôle renforcé. Nous veillerons tout particulièrement, lors des débats, à conserver cet équilibre.

La deuxième ambition que je souhaitais mettre en lumière consiste à redonner du sens à la peine. Taux de récidive toujours aussi élevé, climat carcéral électrique, prisons pleines à craquer : les victimes, les forces de l'ordre et, plus généralement, la société française désespèrent de l'exécution des peines. Les politiques pénales passées sont restées impuissantes. Pourquoi ? D'un côté, la peine a perdu en lisibilité, en immédiateté et en effectivité, perdant ainsi sa force dissuasive. De l'autre, les prisons ne sont pas en état de réinsérer massivement.

Sens de la peine et rôle de la prison sont deux poumons qui s'essoufflent, et nous voulons leur redonner de l'air. Par-dessus tout, la prison ne doit plus être la honte de la République. Nos personnels pénitentiaires méritent d'être placés dans des conditions de travail décentes.

Redonner du sens à la peine, c'est renforcer sa force dissuasive. Lorsqu'il sera puni de plus d'un an de prison, le condamné ne pourra plus bénéficier d'un aménagement de peine. Lorsque la peine de prison sera comprise entre six mois et un an, le tribunal choisira entre le bracelet électronique et la détention, en fonction de la nature de l'infraction et de la personnalité du délinquant. Quant aux peines de prison de moins d'un mois, qui sont désocialisantes sans être dissuasives ni punitives – on le sait pertinemment – , elles seront tout simplement interdites.

J'en viens à l'ambition budgétaire de ce plan de programmation. Nous vous donnons les moyens, madame la garde des sceaux, de lancer des chantiers pour 15 000 places de prison, dont 7 000 seront livrées d'ici à 2022.

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