Intervention de Bérangère Couillard

Séance en hémicycle du jeudi 22 novembre 2018 à 15h00
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Après l'article 18

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBérangère Couillard :

Je partage l'avis de Mme Faucillon. La double domiciliation des enfants ouvre le débat sur l'automaticité de la garde alternée. Je suis, pour ma part, clairement opposée à cet amendement. A priori, la mesure proposée encourage les deux parents à continuer à être parents après leur séparation, ce qui va évidemment dans le bon sens, mais dans les faits, la situation est beaucoup plus complexe. Faut-il rappeler que si la résidence des enfants est majoritairement fixée chez la mère, c'est d'abord parce que 18 % seulement des pères la demandent ? Cette demande est d'ailleurs acceptée dans 90 % des cas.

Dans le partage des allocations après une séparation, les femmes sont beaucoup plus précaires que les hommes, car ce sont majoritairement elles qui ont pris un travail à mi-temps ou qui ont cessé de travailler quand elles ont eu leurs enfants. Pour les plus démunies, en cas de garde alternée, il faudra, en plus, partager les allocations familiales. Qu'en est-il également lorsque l'un des deux parents est victime de violences conjugales ? Je rappelle qu'une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son compagnon ou ex-compagnon. Nous ne pouvons pas prendre ce risque, alors que nous savons que beaucoup de femmes ne portent pas plainte. Votre amendement prend-il en compte ces situations, où les enfants se trouvent au coeur de ces violences ?

Les enfants doivent être notre priorité et être protégés. Que savons-nous du développement et du bien-être des enfants en situation de garde alternée ? Certaines études prouvent que ce mode de garde peut être néfaste au bien-être de l'enfant, surtout pour les plus jeunes.

Le problème n'est pas la double domiciliation en soi – pourquoi pas, si tout se passe bien ? Le problème est que cet amendement tende à la rendre systématique : il ne prévoit rien sur les inégalités femmes-hommes, ni sur les violences conjugales, ni sur le bien-être des enfants. Dans 80 % des cas, la garde alternée fait l'objet d'un consensus lors d'un divorce. Il faut donc laisser le soin à la justice de juger de la garde alternée et de ne l'accorder que si le dialogue est assez fluide entre les parents. Il y va du bien-être des enfants, qui sont trop souvent les principales victimes du divorce.

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