L'Europe dispose d'atouts, à commencer par ses infrastructures spatiales. Pour le système de positionnement Galileo, la priorité à court terme, l'ancrage de la crédibilité de la constellation, et l'enjeu central de l'utilisation effective du signal par les utilisateurs, identifiés en 2016, ont été atteints. Reste la question de l'émergence d'un véritable écosystème autour des applications, et cela nécessite d'abord que les créateurs et les utilisateurs de ces dernières aient une garantie quant au fonctionnement ininterrompu du système à l'avenir. Longtemps dans l'ombre de Galileo, Copernicus s'affirme aujourd'hui comme le porte-drapeau de l'Union en matière spatiale, grâce à la qualité sans équivalent des services ainsi fournis. Assurer une continuité sans faille dans la fourniture des données et services issus des infrastructures spatiales et des capteurs sols doit être une priorité. Ces deux capacités autonomes doivent être confortées, cela passe par des engagements financiers. Ils sont là, mais les discussions en cours au Parlement européen sont de nature à susciter des interrogations là où les utilisateurs souhaitent des assurances. Cela passe également par de nouvelles capacités pour répondre aux besoins exprimés par les utilisateurs ; la Ministérielle de l'ESA devrait apporter des réponses quant au choix et à la mise en service de ces dernières. Ce sont donc là aussi deux points à suivre attentivement.
Mais l'Europe semble encore trop effacée dans le mouvement « d'appropriation de l'espace » en train de se dessiner. La rencontre entre le spatial, le numérique et l'intelligence artificielle déclenche aujourd'hui de nouvelles ambitions. Le « new space », c'est cela : le bouillonnement entre le spatial tel que nous le connaissons et les nouvelles initiatives liées à l'intelligence artificielle. Elles concernent l'espace lointain, mais aussi – et sans doute plus vite – l'orbite basse. Cela pose la question des débris. L'Europe spatiale renforce son cadre de soutien à la surveillance de l'espace et au suivi des objets en orbite, la Commission proposant de muscler le cadre européen de Space Surveillance and Tracking existant et l'ESA de développer une action en propre. C'est positif en soi, mais à condition que les actions soient bien coordonnées et en adéquation avec les moyens. Or pour ce qui concerne l'EU-Space Surveillance and Tracking, le niveau des ambitions de la Commission européenne dans sa proposition de règlement sectoriel sur l'espace détonne avec les moyens proposés, finalement modestes, d'autant qu'ils sont partagés avec l'initiative Govsatcom.
Un autre sujet apparaît, le recensement des ressources lunaires disponibles susceptibles d'être exploitées et utilisées. Les cadres nationaux autorisant les entreprises privées établies dans ces pays à exploiter les ressources spatiales se multiplient. À l'image de son positionnement en matière de lutte et d'adaptation contre les dérèglements climatiques, il y a là une opportunité pour l'Europe de faire entendre une voix singulière, portée, chacun à leur niveau, par les différents acteurs de l'Europe spatiale. À tout le moins, une régulation à l'échelle du continent européen s'impose pour éviter une compétition entre pays européens fondée sur le « moins-disant spatial ».