Madame la secrétaire d'État, ma question porte sur la situation de la psychiatrie à Saint-Étienne. J'y associe mon collègue sénateur de la Loire Jean-Claude Tissot.
En mars 2018, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, Adeline Hazan, a tiré la sonnette d'alarme à propos de la prise en charge des patients en psychiatrie au centre hospitalier universitaire – CHU – de Saint-Etienne. Elle pointait dans son rapport un « traitement inhumain ou dégradant » subi par certains patients, en raison de pratiques de contention ou d'isolement trop systématiques. Parmi les « recommandations en urgence » qu'elle a adressées à la ministre de la santé figure notamment la nécessité de garantir, par des moyens suffisants, des hospitalisations adaptées.
Le recours trop fréquent à la contention n'est malheureusement qu'une conséquence de la surcharge de travail des personnels débordés. Ils sont les premiers à dénoncer cette situation. Ainsi, à Saint-Étienne, les personnels réunis au sein du collectif Psy Cause ont exprimé à de nombreuses reprises leur désarroi face à l'impossibilité de prendre en charge convenablement les patients, faute de moyens et de temps à leur consacrer. Ils sont en grève illimitée depuis le 13 septembre.
Les patients sont confrontés au manque de places en psychiatrie, mais aussi dans les centres médico-psychologiques – CMP. Les délais d'attente sont particulièrement insupportables pour les familles qui souhaitent prendre rendez-vous pour leurs enfants, puisqu'ils peuvent atteindre un an et demi !
Il y a quinze jours, notre collègue François Ruffin a déposé une proposition de loi « visant à sortir la psychiatrie de la maltraitance budgétaire ». Je l'ai cosignée, avec plusieurs députés siégeant dans différents groupes de notre hémicycle. Comme l'illustre malheureusement le cas de Saint-Étienne, cette maltraitance budgétaire prend sur le terrain la forme d'une maltraitance bien réelle pour les patients et les professionnels.
Certes, notre pôle de psychiatrie pourra se réorganiser grâce à la construction d'un nouveau bâtiment, financé à hauteur de 22 millions d'euros par l'Agence régionale de santé – ARS – , concrétisation un projet vieux de dix ans. Mais, avant d'être immobiliers, les besoins sont humains. La direction du CHU a récemment annoncé vouloir recruter l'an prochain dix nouveaux psychiatres, qui s'ajouteraient aux sept recrutés ces derniers mois. Ce qui ressemble à une bonne nouvelle n'est pourtant pas forcément rassurant, quand on connaît bien la situation.
Certes, les conditions proposées par la direction sont attractives, sans compter que le CHU de Saint-Étienne est reconnu pour son niveau d'expertise dans plusieurs domaines et pour la qualité de sa recherche. Mais la surcharge de travail est telle que les psychiatres s'épuisent rapidement, et partent. L'une de ces médecins est même en burn out. C'est la conséquence directe d'une sous-dotation chronique. Avec 11 psychiatres pour 140 000 adultes, soit 7,8 psychiatres pour 100 000 adultes, Saint-Étienne se situe bien en dessous de la moyenne nationale, qui est de 13,5 psychiatres.
S'agissant de santé mentale, les territoires de Saint-Étienne et de la vallée de l'Ondaine ont des besoins supérieurs à la moyenne nationale car ils concentrent les facteurs de risque, comme des indices de précarité très élevés. Et pourtant, les services de psychiatrie manquent cruellement de place. La densité nationale moyenne d'équipement en lits et en places d'hospitalisation à temps complet ou partiel est de 150 pour 100 000 habitants. Avec 424 000 habitants, le territoire stéphanois devrait être doté de 630 places : il n'en a que 440.
C'est pourquoi le rapport Hazan préconisait de ne pas laisser l'établissement seul face à ses difficultés. Pour le moment, les réponses que nous espérions pour la psychiatrie, en France et à Saint-Étienne, ne sont pas à la hauteur.
Quels moyens le Gouvernement compte-t-il apporter au CHU pour répondre aux difficultés structurelles du pôle psychiatrie et aux recommandations du rapport Hazan ?