Je dis nettement au-dessus, parce que le déficit doit dépasser 3 % plusieurs années de suite ou atteindre 3,5 %, ce qui est nettement au-dessus, sur une année – mais je ne veux pas entrer dans les détails techniques.
En tout état de cause, il n'y a aucun de risque de cette nature-là. Néanmoins, la dépense publique doit faire l'objet de réformes structurelles, d'évaluations ; il faut travailler sa qualité, et ce, dans l'intérêt de tous, du Gouvernement comme des députés, quelle que soit leur formation politique, qu'ils soient dans la majorité ou dans l'opposition. Mon message à la France, c'est : encore un effort ! On est passé de 0 à 0,2, sachant que le minimum, pour sortir du risque, est de 0,3. J'espère donc que les prochains budgets continueront à marquer une pente plus favorable.
En ce qui concerne l'intégration des risques sociaux dans le pacte de stabilité et de croissance, nous prenons en compte, depuis le début du mandat, des variables sociales – le chômage des jeunes, le chômage de longue durée, par exemple – dans la procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques. Du reste, ce n'est pas un hasard, monsieur Bricout, si, hier, ce paquet a été présenté par Valdis Dombrovskis et moi-même, mais aussi par notre collègue belge Marianne Thyssen. Il faut davantage d'indicateurs sociaux et les critères sociaux doivent être davantage marqués. Cette Commission a fait quelques progrès en la matière, mais il conviendra de les poursuivre et de les étendre ; je ne me satisfais pas de la situation actuelle. Le combat pour l'Europe sociale doit donc être poursuivi.
S'agissant de la baisse de la PAC, la Commission a proposé pour l'agriculture un budget qui demeure important, puisqu'il atteint 365 milliards d'euros. Il baisse, certes, d'environ 5 %, mais les paiements directs ne sont réduits que de moins de 4 % – 3,9 % pour la France. Les fondamentaux de la PAC sont, à mon sens, largement préservés et ses objectifs restent les mêmes : servir de filet de sécurité aux agriculteurs et assurer la souveraineté alimentaire de notre continent. Nous voulons également que la PAC soit plus équitable, c'est-à-dire qu'elle bénéficie davantage aux petites et moyennes exploitations qu'aux grandes. C'est pourquoi nous offrons aux États membres une plus grande flexibilité pour déterminer les aides versées aux agriculteurs. Le débat, monsieur le député, se poursuit, et il faut désormais se tourner vers les acteurs qui vont intervenir, puisque la Commission a formulé sa proposition : le Parlement européen et le Conseil. On voit d'ailleurs que les négociations seront compliquées. Je ne sais pas si elles aboutiront avant les élections européennes ; on peut le souhaiter, théoriquement, mais, je sais d'expérience que ce sera difficile. Nous continuons néanmoins d'avancer.
Monsieur Gollnisch, la confrontation existe, puisque nous avons, avec l'Italie, des points de vue très différents et que les règles doivent être respectées. Je ne l'exclus donc pas, pourvu qu'elle s'accompagne d'un dialogue. Si la confrontation consiste en un dialogue de sourds, s'il s'agit de ne pas se parler et de ne pas chercher de rapprochement, telle n'est pas mon attitude. Ce n'est pas non plus une confrontation au sens d'une opposition ; il s'agit simplement de faire respecter une règle. Le dialogue, le dialogue, le dialogue : ce sera toujours mon mot d'ordre.
Madame Cariou, le dossier de l'ACCIS ne sera pas dans l'état où on me l'a laissé. En effet, lorsque je suis arrivé à la Commission, la proposition de directive était, en vérité, morte. Après avoir évalué ses chances et son actualité, la Commission a donc estimé qu'il fallait la retirer et en proposer une nouvelle. Celle-ci a été beaucoup travaillée, mais les progrès politiques n'ont pas été aussi importants que les progrès techniques. Il appartiendra à la prochaine Commission de décider. Mais nous ne sommes pas du tout dans la même situation : la proposition actuelle est assez robuste et pourrait, si des efforts étaient consentis, si le Conseil décidait de lui donner la priorité qu'elle mérite, être adoptée assez rapidement. Nous avons tout de même avancé sur au moins deux tiers des questions ; le sujet n'est donc pas du tout éteint.
En ce qui concerne ce que l'on appelle le country by country reporting, c'est-à-dire le suivi pays par pays, la transparence est un élément central de notre stratégie pour une fiscalité plus juste au plan mondial. Certaines multinationales estiment que, dans un contexte concurrentiel, elles ne peuvent pas ne pas mettre en oeuvre certaines stratégies de planification fiscale employées par leurs concurrents, même si c'est éthiquement discutable. Ce sujet fait partie de ceux sur lesquels nous avons avancé. Ainsi, je le signale, la Commission a fait adopter très rapidement une directive qui étend l'obligation de transparence envers les administrations fiscales aux intermédiaires – banquiers, conseillers fiscaux, avocats... –, qui doivent signaler les montages de planification fiscale agressive qu'ils vendent à leurs clients. La transparence s'impose à tous. Les organisations non gouvernementales et l'opinion publique dissuaderont les entreprises de s'en éloigner. La proposition de la Commission est en cours de discussion au Conseil et au Parlement européen, et je suis obligé de constater que, si celui-ci est un soutien extrêmement puissant, subsistent au sein du Conseil des réticences que je regrette. Je ne veux pas faire de distinction entre les pays, mais j'attends de tous un effort important.
Aucun cas concernant le logement social français n'est pendant devant la Commission. Celle-ci a, certes, examiné une plainte qui lui avait été soumise par l'Union nationale de la propriété immobilière le 5 mai 2012. Mais cette plainte a été close le 26 septembre 2017, avec l'accord de l'UNPI, suite notamment à l'adoption de la loi du 27 janvier 2017 dite « Égalité et citoyenneté », qui a, semble-t-il, répondu à certaines des préoccupations du plaignant. Nous n'avons pas d'éléments récents susceptibles de nourrir une réflexion sur le modèle de financement du logement social français. Nous sommes cependant toujours prêts, bien entendu, à débattre ou à répondre à des propositions.
Enfin, j'en termine par un sujet qui m'est cher. Il y a encore peu de temps, j'ai reçu dans mon bureau, à la Commission européenne, une délégation d'agriculteurs bretons pour en parler. Comme vous le savez, j'ai ouvert, en mars dernier, une procédure d'infraction concernant le régime forfaitaire de TVA appliqué au secteur agricole en Allemagne. Ce régime forfaitaire a été élaboré dans les années 1970, en tenant compte de la nouveauté représentée à cette époque par la TVA ainsi que de la situation des agriculteurs d'alors, qui n'est évidemment plus celle d'aujourd'hui. L'objectif de cette procédure est d'éviter toute distorsion de concurrence entre les agriculteurs au niveau national et européen. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le régime est également en cours de vérification chez ma collègue Margrethe Vestager, qui est compétente en matière d'aides d'État.
Selon mes services, en qui j'ai toute confiance, l'Allemagne applique le régime de simplification conçu pour les petits agriculteurs de manière trop large. Il en résulte, soit des avantages administratifs indus, soit des distorsions de concurrence au profit des gros agriculteurs allemands, qui reçoivent une compensation de TVA excessive. L'infraction la plus grave semble être, à l'heure actuelle, la surcompensation, à nos yeux illégale et perçue comme une subvention fiscale, des agriculteurs soumis au forfait. À partir de 2015, la Commission dispose d'éléments indiquant que cette surcompensation s'élève à 200 millions d'euros par an, ce qui n'est pas négligeable. L'Allemagne a répondu, au mois de mai, à la lettre de mise en demeure, en défendant à la fois le champ d'application du régime d'aides forfaitaires allemand et le niveau du taux de compensation. Mes services sont en train d'examiner attentivement l'ensemble des données et des arguments, dont la réponse des autorités allemandes, puisqu'il s'agit d'une procédure contradictoire. Si la Commission n'est pas convaincue par les contre-arguments de l'Allemagne – ce qui, disons-le, semble être le cas –, cela pourrait – je ne l'annonce pas, j'en indique la possibilité – conduire à enclencher l'étape suivante de la procédure d'infraction, à savoir l'envoi d'un avis motivé demandant formellement aux autorités allemandes de se conformer au droit de l'Union. Les agriculteurs français doivent donc savoir que ce dossier est suivi et que nous sommes actifs.
Plus généralement, ce cas est révélateur de la difficulté à faire évoluer la directive TVA avec son temps, du fait de la règle de l'unanimité. Il faut mettre fin à cette lourdeur : rendez-vous compte que nous vivons sous un régime transitoire depuis 1993 ! Je ferai donc, l'an prochain, des propositions aux États membres pour introduire une dose de majorité qualifiée en matière fiscale, et je peux déjà vous annoncer que la TVA fera partie de ces propositions. Comment cette décision sera-t-elle prise ? Plusieurs formules sont envisageables : l'unanimité, la « clause passerelle » ou l'article 116. Nous y reviendrons la prochaine fois, si vous me réinvitez.