Intervention de Nicole Belloubet

Séance en hémicycle du lundi 3 décembre 2018 à 21h35
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Article 43

Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice :

Quelques mots pour présenter l'échelle des peines qui figure à l'article 43. Le système actuel est selon nous peu lisible – on ne sait plus très bien qui y fait quoi, entre un tribunal qui prononce une sanction qui ne sera pas exécutée telle qu'il l'a prononcée, l'intervention du juge d'application des peines, etc. – , déresponsabilisant pour les tribunaux – lesquels prononcent des peines qui ne seront pas exécutées telles qu'elles ont été prononcées – , et peu crédible pour nos concitoyens qui voient qu'alors qu'une peine d'emprisonnement a été prononcée, l'intéressé n'ira jamais en détention – je pourrais citer d'autres constats de cette nature.

Nous avons donc fait un choix clair, fondé sur ces deux principes : toute infraction mérite sanction – c'est à nos yeux capital ; mais il faut des sanctions adaptées à la personnalité du condamné, à ses antécédents, à l'infraction commise, à sa dangerosité, etc. Tels sont les principes qui nous guident pour parvenir à des peines vraiment effectives.

Sur ces fondements, nous avons décidé, d'une part, de créer différentes peines autonomes, c'est-à-dire déréférencées – si je puis utiliser ce terme – de la notion d'emprisonnement. Parmi elles, la détention à domicile sous surveillance électronique. Pourquoi en avons-nous fait une peine autonome ? Pour que le juge puisse la prononcer plus aisément, car nous savons que, dans certains cas, elle correspondra véritablement à la personnalité des condamnés. S'y ajoutent le TIG, bien sûr, dont les conditions de prononcé sont considérablement améliorées – nous aurons l'occasion d'y revenir – , ainsi que le stage, qui devient un stage unique subdivisé en plusieurs catégories.

Par ailleurs, nous modifions la compréhension de la détention en considérant qu'une peine de détention d'un mois n'a aucun sens, parce qu'elle est exclusivement désocialisante et ne permet pas d'éviter la récidive ni d'assurer la réinsertion sociale, ce qui fait pourtant partie des objectifs de la peine. Nous avons donc décidé qu'en dessous d'un mois il n'y aurait pas d'emprisonnement. Entre un et six mois, par principe, la peine doit s'effectuer en dehors de l'établissement pénitentiaire ; bien sûr, il peut y avoir des cas dans lesquels l'emprisonnement restera possible. Entre six mois et un an, nous permettons au tribunal de prononcer des peines réellement exécutées. C'est seulement au-delà d'un an que la peine d'emprisonnement pourra être aménagée le cas échéant.

Voilà une gradation claire, responsabilisante pour les tribunaux, réellement adaptée à la situation des condamnés. C'est grâce à cet ensemble de politiques pénales, joint au programme immobilier pénitentiaire dont nous avons eu l'occasion de parler et qui sera, lui aussi, différencié et adapté, que nous espérons pouvoir disposer de sanctions répondant efficacement aux infractions commises, mais également réduire la surpopulation carcérale.

Voilà pourquoi le Gouvernement tient évidemment à l'échelle des peines telle qu'il l'a reconstruite et émet un avis défavorable aux amendements en discussion.

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