Intervention de Ugo Bernalicis

Séance en hémicycle du lundi 3 décembre 2018 à 21h35
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Article 45

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaUgo Bernalicis :

C'est un terme que j'accepte volontiers, monsieur le président !

Le Gouvernement fait le choix de limiter les possibilités d'aménagements de peine en réduisant le champ de l'application de l'article 723-15 du code de procédure pénale, bien connu des professionnels. Ce choix, ainsi que la volonté affirmée de favoriser la construction d'établissements pénitentiaires, est aux antipodes du projet politique de la France insoumise.

Est-ce à dire que, pour le Gouvernement et le groupe La République en marche, il faut construire plus pour aménager moins ?

Nous souhaitons alerter le Gouvernement sur les effets désastreux de cette évolution législative, dont la conséquence directe sera une augmentation importante du nombre de personnes en détention – plus de 9 000 détenus supplémentaires – , alors que la capacité carcérale des maisons d'arrêt est déjà saturée. Les 8 000 places en construction ne suffiront pas !

En outre, comme le souligne le Syndicat de la magistrature ou encore la CGT insertion probation, les dispositions de l'article 723-15 permettent une prise en compte dynamique de la situation des personnes condamnées à de courtes peines. Selon nous, il faut favoriser et non réduire les possibilités d'aménagement pour les courtes peines. Or, votre proposition a pour conséquence de freiner drastiquement le développement de tels aménagements, et tout particulièrement pour les personnes condamnées à des courtes peines, qui représentent la part la plus importante de la population carcérale actuelle et pour lesquelles la solution de l'emprisonnement n'est bien souvent pas adaptée.

Madame la ministre, vous voulez faire la balance entre la construction annoncée de 8 000 places de prison, 15 000 à terme, et la volonté d'éloigner des prisons ceux qui n'ont rien à y faire, par exemple en supprimant les peines inférieures à un mois de prison. Mais à cet instant, sur 71 000 détenus, entre 200 et 800 seulement seraient concernés par cette mesure. Ce n'est pas ainsi que vous allez vider les prisons ! Quant à l'obligation d'exécuter les peines inférieures à six mois en milieu ouvert, de nombreux aménagements de peine sont déjà possibles pour ce type de public – 170 000 personnes exécutent leur peine en milieu ouvert aujourd'hui ! Contre 70 000 en détention !

Avec l'article 45, vous inversez cette tendance, qui ne permet déjà pas de réduire le nombre de personnes incarcérées – celui-ci ne cesse d'augmenter. C'est à ne plus rien y comprendre, à moins que vous ne souhaitiez envoyer un signal de fermeté, ou vous vanter d'un pseudo-équilibre – ce n'en est pas un, c'est une chimère.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.