Monsieur Rebeyrotte, je souhaite que le groupe de travail que nous allons créer et votre délégation se penchent sur la question de la lisibilité des règles relatives à l'investissement local, soit pour les faire évoluer, soit pour en faire la pédagogie. En effet, que ce soit dans une assemblée de maires ou au Parlement, on ne cesse de m'interpeller sur la variation des enveloppes de la DETR d'un département à l'autre. Étant pragmatique – je m'efforce de ne pas oublier, dans le cadre de mes nouvelles fonctions ministérielles, que j'ai été maire et président de conseil départemental –, je considère que, si tout le monde me pose la même question, je dois y répondre. Même si c'est pour confirmer que l'on ne peut pas faire mieux, il faut s'en assurer.
Vous m'avez également interrogé sur la prévisibilité de la DGF. J'insisterai, à cet égard, sur le devoir d'information. Au maire dont la DGF varie de manière importante, il faut expliquer les raisons de cette variation : évolution de la démographie, d'un élément fiscal… L'élu concerné vit souvent mieux la situation si on lui explique pourquoi sa DGF baisse. On ne le dit pas assez – je constate parfois, sur le terrain, une grande démagogie qui me met un peu en colère –, mais les évolutions s'expliquent par l'application de critères qui, soyons honnêtes, n'ont pas été modifiés par la loi NOTRe. Les mêmes critères se sont appliqués à la nouvelle carte.
À ce propos – le sénateur Rémy Pointereau a déposé une proposition de loi qu'il faut, me semble-t-il, étudier avec attention –, on aurait dû insister davantage sur le devoir d'informer les élus. Je pense notamment aux élus des territoires les plus ruraux, qui n'ont pas forcément été avertis qu'un changement de périmètre de l'intercommunalité ferait varier leur DGF. Ce devoir d'information incombe autant aux représentants de l'État, notamment à la direction départementale des finances publiques, qu'aux grandes intercommunalités – je mets les pieds dans le plat – qui ont accueilli des communautés de communes moins importantes, lesquelles n'avaient pas forcément l'ingénierie financière nécessaire pour évaluer les conséquences d'une telle intégration. C'était le cas, par exemple, de la communauté de communes de Saint-André-de-l'Eure, dans mon département : elle n'avait pas les moyens humains de savoir ce qui attendait ses communes une fois qu'elles auraient intégré la communauté d'agglomération d'Évreux. Celle-ci, en revanche, aurait parfaitement pu les en informer. Un maire ou un adjoint au maire qui célèbre un mariage ne demande-t-il pas aux futurs époux s'ils ont conclu un contrat de mariage ? Qu'il s'agisse du rapprochement d'EPCI ou de la sortie ou de l'entrée de quelques communes, l'information sur l'impact financier d'une telle évolution doit être rendue obligatoire, afin qu'aucun conseiller municipal ne puisse dire qu'il ne savait pas.
Monsieur Schellenberger, il est clair qu'en matière de différenciation votre territoire est le plus en avance, pour des raisons qui tiennent à son histoire mais aussi à la mobilisation des élus locaux et des parlementaires ainsi qu'à l'investissement de Jacqueline Gourault. Existe-t-il d'autres modèles ? Oui. Je pense aux choix qui ont pu être faits dans le monde ultramarin, tant en matière institutionnelle qu'en matière de décentralisation et de déconcentration. En effet, dans certains territoires d'outre-mer, le préfet a davantage de pouvoir qu'un préfet en métropole, et c'est logique car plus on est loin de Paris, plus il faut être proche de la décision territoriale. Par ailleurs, un certain nombre de compétences sont exercées par les collectivités ultramarines, dans le domaine environnemental par exemple. Ce sont des sources d'inspiration intéressantes. D'autres territoires commencent à réfléchir, en vue de la réforme constitutionnelle, à la conclusion de pactes locaux autour de projets et de compétences. J'ai cité le département des Ardennes à dessein car, parmi les grandes problématiques auxquelles il est confronté, figurent les questions sanitaires et médicales, abordées en lien avec ses voisins belges.
Voilà des pistes qu'il faut explorer. Lorsqu'ils reprendront, les travaux parlementaires sur la réforme constitutionnelle permettront de donner un peu de chair et de corps à tout cela. Très rapidement, des demandes s'exprimeront ; j'ai cru comprendre que, du côté de la Bretagne, des projets se dessinaient.
Monsieur Baudu, les élus locaux seront, bien entendu, associés à toutes les initiatives du Gouvernement en matière de consultation territoriale. Du reste, si, lors de la présentation de sa stratégie pour la transition énergétique, le Président de la République a placé au premier rang les présidents Morin et Baroin et le représentant du président Bussereau, c'est bien pour souligner l'engagement des collectivités locales en la matière. La taxe carbone, on en pense ce que l'on ne veut, mais beaucoup d'élus locaux se sont mobilisés, depuis plus d'un an, pour en récupérer une partie – ce que l'on appelle la fraction du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) – afin de financer notamment des projets de transition écologique. C'est une question qu'il faut mettre sur la table dans le cadre de la réforme de la fiscalité locale, car elle est intéressante et mérite d'être posée.
Madame Pires Beaune, nous avons déjà discuté de la dotation d'intercommunalité en séance publique. Depuis, mon cabinet vous a d'ailleurs fait parvenir, comme je m'y étais engagé, l'ensemble des prévisions réalisées en la matière. Je précise, à ce propos, que je tiens à ce qu'à l'avenir, en amont comme en aval, nous continuions à travailler ainsi, avec tous les groupes, en faisant circuler l'information, même s'il est vrai, comme le disait le député Carrez, que les simulations ne font pas toujours de bonnes politiques dans la mesure où elles peuvent conduire à renoncer à certaines décisions. En tout état de cause, il n'y a jamais trop de transparence.
Peut-on mener de front la réforme de la DGF et celle de la fiscalité locale ? La réforme de la fiscalité locale est voulue par l'exécutif. Selon son calendrier, un projet de loi de finances rectificative vous sera soumis au premier semestre de l'année prochaine, probablement en mai ou en juin 2019. Le texte serait présenté en conseil des ministres quelques semaines plus tôt. Nous avons donc du temps, même s'il est contraint.