Monsieur le ministre, la question des personnels est fondamentale. Après avoir subi ces dernières années une baisse du nombre des douaniers, aujourd'hui on nous dit que les effectifs vont augmenter. Mais l'érosion était telle que je ne suis pas certain que l'augmentation proposée par votre collègue sera suffisante.
C'est avec la douane qu'a lieu le premier contact de la marchandise avec le pays : c'est elle qui fait les premières découvertes, avant que les vétérinaires ne procèdent à l'analyse physique des produits, éventuellement en laboratoire. Nos grands ports, Le Havre, Dunkerque, habitués à accueillir des navires du monde entier, étaient équipés en termes de police aux frontières, de douane et de services vétérinaires ; mais d'autres comme Saint-Malo, Roscoff, Dieppe ou Calais, dans lesquels le trafic restait exclusivement européen « intra muros », puisqu'à destination de la seule Grande-Bretagne vont devoir s'adapter aux exigences du trafic international. Aussi auront-ils besoin de ces effectifs supplémentaires et d'une organisation efficace, car à côté de la question des contrôles se pose celle de la santé du peuple européen – à supposer qu'il y ait un peuple européen, en tout cas des peuples qui fondent l'Europe, et en premier lieu du peuple français.
Lors des discussions qui ont eu lieu, notamment sur le Comprehensive Economic and Trade Agreement (CETA), la question des produits alimentaires a souvent été posée, comme l'a été celle de la qualité des produits alimentaires par rapport à l'impact sur l'agriculture française. Bien évidemment, elle se pose avec d'autant plus d'acuité avec le Brexit. Or, pour l'instant, la réponse ne nous semble pas être à la hauteur du besoin estimé, y compris de l'avis des acteurs présents sur le trait de côte. Vous avez indiqué vous être rendu dans les ports ; pour ma part, j'ai accompagné le coordonnateur au port du Havre où la société Brittany Ferries nous a expliqué qu'elle s'attendait à une évolution du trafic et donc des flottes par le fait que les marchandises allaient dorénavant emprunter différents itinéraires. Aujourd'hui, vous nous apportez une réponse sur l'existant ; c'est déjà une réponse, à ceci près que nous savons d'ores déjà qu'il va y avoir une mutation de l'existant du fait de l'apparition de nouvelles frontières. Or on n'a pas le sentiment que le Gouvernement prend la mesure de l'impact qu'aura le Brexit.
Comme je suis assez pointilleux, quand je ne comprends pas, je pose des questions jusqu'à ce que je comprenne – c'est un principe chez moi. On m'a donc expliqué que le pôle vétérinaire a été basé au Havre, mais qu'il allait intervenir sur Cherbourg, Dieppe, Ouistreham, etc. Le seul port dont on ne m'a pas parlé, c'est celui de Saint-Malo. Peut-être est-ce parce qu'il y a eu là-bas quelque chose de spécial – il n'y a peut-être pas de moutons à Jersey… Il va falloir accroître le nombre de vétérinaires, revoir leur statut, etc. ; mais jusqu'à présent, on reste dans un flou artistique, ce qui met les personnels dans une situation un peu compliquée et ne contribue pas à les rassurer. Certes, ils ont l'habitude d'être confrontés à des situations difficiles et ils comprennent qu'on ne peut pas avoir une réponse immédiate, que tout dépendra si le Brexit sera dur ou mou ; mais ils voudraient savoir si le Gouvernement a pris la mesure de l'ampleur de la question, s'il est prêt, par le biais éventuellement des ordonnances, à débloquer les moyens nécessaires et indispensables au moment où cela s'imposera, ou s'ils doivent s'attendre à vivre une situation de crise pendant des mois, voire des années parce que les choses n'auront pas été suffisamment anticipées. Cela fait un moment qu'on sait que les Britanniques ont voté pour le Brexit, et dans mon beau port du Havre, si vous me permettez cette expression, cela fait longtemps que les choses ont été anticipées.