Alors que notre pays connaît la plus grave crise sociale de son histoire depuis 1968, alors que des millions de Français appellent au secours et demandent au Gouvernement des mesures d'urgence pour survivre après le 15 du mois, alors que la fracture entre ceux qui se croient tout et ceux qui ont été traités de « rien » n'a jamais été aussi importante, l'Assemblée nationale discute ce matin du démarchage téléphonique et des appels frauduleux.
Cet ordre du jour pourrait prêter à sourire, mais il met une nouvelle fois en lumière la déconnexion totale de nos institutions, qui ne répondent plus aux préoccupations majeures des Français. Hier, les appels du peuple sonnaient dans le vide. Aujourd'hui, nous pouvons dire que la ligne est définitivement coupée.
Loin de moi l'idée de vouloir éluder la lutte contre les appels frauduleux, qui a évidemment son intérêt, mais ce débat comme d'autres d'ailleurs – je pense à celui sur l'interdiction de la fessée – , méritait d'être reporté à une date ultérieure.
Cinq mois après l'examen de la proposition de loi très concrète de Pierre Cordier, la protection du consommateur de téléphonie s'invite à nouveau dans notre hémicycle. La nuance entre les deux textes réside dans le renforcement de la lutte contre les appels frauduleux, notamment depuis des numéros surtaxés.
Ces dernières années, le démarchage téléphonique s'est considérablement développé accompagnant de nouvelles pratiques commerciales agressives, qui virent parfois au harcèlement. Chaque jour, nos compatriotes sont dérangés, importunés, escroqués et même menacés par des gens qu'ont missionnés de prétendues institutions publiques ou des instituts de sondages malveillants.
L'objectif est toujours le même : recueillir des informations personnelles, profiter de la fragilité des personnes, notamment âgées, pour leur soutirer leurs maigres économies.
Il y a quelques semaines, dans le Finistère, une société se présentant comme un hôpital annonçait réaliser une enquête téléphonique sur les mutuelles en demandant aux personnes interrogées des informations sur leurs complémentaires santé. Après les plaintes de plusieurs victimes, le centre hospitalier a invité les usagers à ne pas communiquer d'informations personnelles lors de ces appels et à déposer plainte auprès de la gendarmerie.
Autre exemple : en Ille-et-Vilaine, les faux agents d'un syndicat mixte de traitement des ordures ménagères ont démarché par téléphone les habitants en leur demandant de prendre un rendez-vous à leur domicile et en leur promettant une subvention.
Tous les jours, quelquefois plusieurs fois par jour, même le soir et le week-end, des plateformes commerciales et des fournisseurs d'accès à internet appellent nos concitoyens pour des enquêtes de satisfaction qui visent en réalité à leur faire souscrire de nouveaux abonnements.
La proposition de loi, si elle ne manque pas d'intérêt, manque singulièrement d'ambition. En effet, nous ne pouvons que regretter la caution que constitue la logique de l'opt-out. Aux termes de ce texte, les usagers pourront encore être importunés par une entreprise jusqu'à six mois après l'exécution du contrat qui les liait.