Intervention de Nicole Belloubet

Séance en hémicycle du mardi 11 décembre 2018 à 9h30
Questions orales sans débat — Prise en charge des patients détenus

Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice :

Monsieur le député, les soins psychiatriques aux personnes détenues relèvent du ministère des solidarités et de la santé. La loi du 18 janvier 1994 relative à la santé publique et à la protection sociale a, en effet, transféré au service public hospitalier l'organisation et la gestion de la prise en charge sanitaire des personnes détenues. Dans un contexte de forte prévalence des troubles mentaux en détention, dont témoigne le nombre d'hospitalisations psychiatriques de personnes détenues, qui, entre 2009 et 2016, a augmenté proportionnellement plus vite que la population pénale sur la même période – plus 15,3 % contre plus 11 % – , la prise en charge du patient détenu représente un problème réel.

Les personnes détenues souffrant de troubles mentaux peuvent être hospitalisées sans consentement dans trois types de structures : en unité hospitalière spécialement aménagée, UHSA – il en existe neuf sur le territoire, pour un total de 440 places d'hospitalisation ; en unité pour malades difficiles, UMD, lorsque que ces personnes « présentent pour autrui un danger tel que les soins, la surveillance et les mesures de sûreté nécessaires ne peuvent être mis en oeuvre que dans une unité spécifique » ; en chambre sécurisée au sein de l'hôpital spécialisé en psychiatrie de secteur. L'hospitalisation en chambre sécurisée des personnes détenues peut toutefois résulter d'un choix par défaut, faute de places en UHSA. Ces dernières présentent une sécurisation renforcée, avec la présence quotidienne de personnel de surveillance pénitentiaire, mais certains établissements pénitentiaires sont éloignés de ces structures, ce qui les oblige à trouver d'autres solutions.

Dans ce contexte, le ministère de la justice et le ministère des solidarités et de la santé ont demandé à l'Inspection générale de la justice et à l'Inspection générale des affaires sociales de réaliser un audit conjoint de ces situations, dont les résultats seront connus dans quelques semaines. De fait, la question de la garde de ces détenus malades – ou de ces malades détenus – ne se pose pas pour les placements en UHSA ou en unité hospitalière sécurisée interrégionale, UHSI, puisque le personnel pénitentiaire assure naturellement ce rôle dans ces établissements. Il en va de même pour les extractions médicales de courte durée, pour lesquelles le cadre normatif confie la fonction de surveillance aux forces de sécurité intérieure. Votre question porte donc essentiellement sur les hospitalisations sur demande d'un représentant de l'État, qui concernent les détenus présentant une certaine dangerosité mais ne pouvant pas faire l'objet d'une affectation en UMD.

Cette question – qui, aux termes de la loi, relève du ministère de la santé – soulève un véritable problème, tout comme celle de la continuité des soins d'une personne détenue qui revient en détention après une hospitalisation. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes récemment rencontrées avec ma collègue Christelle Dubos afin de réfléchir aux meilleures manières de traiter ces différents enjeux difficiles.

Au-delà du rapport sur les UHSA que nous attendons dans quelques semaines, et de l'engagement 21 de la feuille de route pour la santé mentale, qui sera consacré aux personnes détenues, nous allons envisager toutes les solutions pour améliorer la prise en charge psychiatrique des personnes détenues, qui représente un véritable sujet. Cela passe en premier lieu par une plus grande connaissance de la prévalence de ces troubles dans la population carcérale. C'est pourquoi, dès le début de l'année prochaine, nous allons initier une étude scientifique sur cette question pour déterminer combien de personnes relèvent de cette problématique. Dès que cette étude sera réalisée, voire en parallèle, nous allons réfléchir aux solutions concrètes à apporter.

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