J'ai bien compris vos impératifs techniques, madame le ministre. Je reste cependant convaincu qu'une réforme de la justice, que l'on dit être globale, doit aborder l'accès au droit. Les avocats se sont mobilisés contre votre réforme ; il eût été intéressant de débattre, avec eux, de l'aide juridictionnelle : ils auraient eu beaucoup de choses à vous dire à ce sujet.
Sur le fond, nous en revenons au débat que nous avons eu tout à l'heure. Un droit que l'on accorde à tout le monde, sans discrimination, est un droit qui risque de manquer à ceux qui en ont le plus besoin. On le voit avec le droit d'asile : celui-ci est tellement instrumentalisé que les véritables demandeurs d'asile sont traités de la même manière que ceux qui n'y ont pas droit. Cela cause des engorgements, des files d'attente, d'où résultent des cas de déni de droit. Il en va de même pour l'aide juridictionnelle : nos collègues proposent simplement, par ces amendements, de la réserver à ceux qui en ont véritablement besoin.
En ouvrant l'aide juridictionnelle à tout le monde, sans aucun filtre, vous mettez sur le même plan ceux qui en ont vraiment besoin et ceux qui risquent d'en abuser. Il était question, tout à l'heure, d'enchères : en l'espèce, le risque est que celui qui remporte l'enchère, en l'espèce accède à cette aide, ne soit pas celui dont le dossier le justifie le mieux. Il convient donc d'instituer des critères pour le recours à ce droit, des mécanismes de conseil et d'orientation, sinon de filtrage, afin de l'optimiser et d'éviter qu'il soit dévoyé.