Deuxième défi : notre capacité à converger sur la solution technologique qui sera en définitive retenue pour les futurs missiles.
En effet, la France a traditionnellement fait le choix de la vitesse, notamment pour la dissuasion nucléaire, tandis que les Britanniques ont, jusqu'alors, davantage privilégié la furtivité de leurs armes. Dans ce contexte, chacun pourrait être tenté de faire pression pour imposer sa préférence à l'autre. De manière connexe, se pose d'ailleurs la question du partage industriel entre nos deux pays une fois lancée la phase de développement.
Bien sûr, le critère de l'efficacité opérationnelle devra primer. Il nous est néanmoins apparu qu'une solution pourrait satisfaire l'ensemble des acteurs, tout en répondant à notre besoin opérationnel. Il s'agirait ainsi de faire le choix d'un missile supersonique et manoeuvrant pour la capacité anti-navires et de suppression des défenses anti-aériennes, et d'un missile subsonique furtif pour la frappe dans la profondeur. Le programme FMANFMC pourrait ainsi aboutir, non pas à un vecteur unique, mais à une famille de missiles partageant un nombre élevé de fonctions communes.
N'anticipons néanmoins pas les résultats de la phase de concept, dont l'objet est précisément d'identifier les solutions technologiques permettant de répondre au besoin opérationnel.
En somme, laissons les ingénieurs et les responsables militaires poursuivre leurs travaux car le temps de la décision politique n'est pas encore venu !
J'en viens à présent à la troisième question qu'il nous reste à trancher, à savoir la procédure d'acquisition des futurs missiles.
Soyons clairs et fermes : du point de vue français, il n'y a aucun débat ! Il n'y a aucune raison que le contrat de développement et de production ne soit pas notifié à la société MBDA. Pour la partie britannique, les choses sont un peu plus délicates, la mise en concurrence étant presque « culturelle ».
Toutefois, nous sommes parvenus à un accord, en rappelant l'attachement de chaque partie au principe de « value for money ». En somme, nos homologues semblent prêts à envisager une absence de mise en concurrence, soit l'attribution à MBDA du contrat, dès lors que des dispositions sont prises en amont afin de prévenir tout prix exorbitant.
Dans ce contexte, notre rapport se contente d'appeler les autorités des deux pays à engager dès à présent des discussions sur les modalités de passation du contrat final, afin de clarifier les choses. Tel est l'intérêt de l'ensemble des parties.
Le rapport rappelle néanmoins avec force les solides arguments qui s'attachent à la notification de ce contrat à la société MBDA, qui tiennent à la souveraineté qu'il importe de conserver sur ces capacités ainsi qu'à la préservation et au renforcement de notre autonomie stratégique.
La dernière question, dont la réponse a été plus facile à trouver, porte sur l'interopérabilité des futurs missiles avec les systèmes employés par nos alliés. Deux raisons justifient le besoin d'assurer cette interopérabilité : une raison opérationnelle, qui tient à notre capacité à participer à des opérations majeures conduites en coalition ; et une raison commerciale, l'interopérabilité assurant de réels avantages à l'exportation vers les pays tiers.
Pour nous, il ne fait nul doute que les futurs missiles devront être interopérables. Les Britanniques ont néanmoins souhaité que soit rappelé leur attachement à ce que le FMANFMC puisse être emporté sous le F-35.
Nos deux pays s'accordent donc sur le besoin d'assurer l'interopérabilité des futurs missiles avec les systèmes alliés, d'autant plus que cela n'obère pas la souveraineté « de bout en bout » que nous visons sur ces futurs missiles.
En définitive, si des réponses doivent encore être apportées à toutes ces questions, nous sommes tout à fait optimistes sur la capacité de nos deux pays à s'entendre pour mener ce programme d'armement jusqu'à son terme.