Intervention de Muriel Pénicaud

Séance en hémicycle du lundi 10 juillet 2017 à 21h30
Renforcement du dialogue social — Article 1er

Muriel Pénicaud, ministre du travail :

Je vous ai écouté : je vous remercie de m'écouter à votre tour.

Comme je m'y suis engagée, je souhaite apporter des précisions sur ce que nous avons retenu à ce jour de la concertation concernant le premier bloc, soit les rapports entre la branche et l'entreprise. Nous considérons que la clarification et la sécurisation de l'ensemble supposent de définir trois niveaux.

Au premier niveau, les accords de branche priment impérativement sur les accords d'entreprise. C'est le cas pour les minima conventionnels, les classifications, la mutualisation des financements paritaires – fonds de financement du paritarisme, fonds de la formation professionnelle, fonds de prévoyance, complémentaire santé et compléments d'indemnité journalière. En outre, et c'est nouveau, nous proposons d'ajouter aux accords de branche la gestion de la qualité de l'emploi : durée minimale du temps partiel et des compléments d'heure, régulations des contrats courts, conditions de recours aux contrats à durée indéterminée de chantier.

Bien évidemment, en l'absence d'accords de branche, c'est la loi actuelle qui continuera de s'appliquer. Notre système reste supplétif : faute d'accord d'entreprise, c'est l'accord de branche s'applique ; faute d'accord de branche, c'est la loi – dans certains domaines, cela ne peut être d'ailleurs que la loi ou l'accord de branche.

Autre point très important qui doit figurer dans tous les accords de branche : l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Si le principe figure évidemment dans la loi, les modalités de sa mise en oeuvre ne sont toujours pas effectives bien que la loi en question date d'une quinzaine d'années. C'est une priorité pour les branches.

Le deuxième bloc serait constitué des domaines pour lesquels la branche peut décider de primer sur les accords d'entreprise, sans y être d'ailleurs obligée. Soit un accord de branche est conclu, auquel se réfèrent les entreprises qui le souhaitent, soit elle le « verrouille », comme on dit dans le jargon des partenaires sociaux, c'est-à-dire qu'elle l'impose aux entreprises. C'est en tout cas la branche qui décide, les situations étant très différentes d'un secteur à l'autre.

Pourraient faire partie de ce deuxième bloc la prévention des risques professionnels, la prévention de la pénibilité, le handicap et – c'est un élément nouveau – les conditions et les moyens d'exercice d'un mandat syndical, la reconnaissance des compétences acquises et les évolutions de carrière. Dès lors que nous considérons que le dialogue social renforcé sera à la fois un élément de compétitivité et de justice sociale, il faut s'assurer que les organisations syndicales et les délégués syndicaux en ont les moyens. La reconnaissance des parcours et des carrières notamment est un élément décisif de cette réussite.

Le troisième bloc, celui qui est au coeur de notre débat, est constitué par les domaines qui ne figurent pas dans les deux blocs précédents. Là, et c'est une nouveauté, nous disons en effet que l'accord d'entreprise prime – sous réserve bien entendu du respect des dispositions prévues, dont j'ai déjà parlé.

En quoi cela diffère-t-il de la situation actuelle ? Par le champs d'application, tout d'abord, puisque si ni la loi ni la branche ne s'en saisissent, c'est finalement parce que cela peut être tout à fait adapté au plus proche du terrain. Surtout cela permet de combiner plusieurs thèmes afin de réaliser de véritables avancées sociales et économiques.

Je vais vous en donner un exemple. Voilà quelques jours, je me suis rendue dans une entreprise de menuiserie industrielle à Chollet qui emploie quatre cent personnes, qui est en croissance et qui a besoin de recruter quatre-vingt personnes. Impossible de trouver des salariés sur le marché local de l'emploi. Les syndicats ont donc proposé que des femmes soient recrutées pour ce métier considéré comme un métier d'hommes. Dès lors, les postes de travail devaient être adaptés. Un accord portant sur la qualité de vie au travail a donc été passé, qui est aussi devenu un accord sur l'égalité entre les hommes et les femmes. Des marchés ont été remportés et un accord a été réalisé sur le temps de travail, notamment le recours au travail du week-end. Ce ne sont pas moins de cinq sujets qui ont été ainsi traités. Un seul thème très détaillé depuis la branche n'aurait pas permis de telles avancées.

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