Par cet amendement de suppression, nous souhaitons prévenir l'élargissement potentiellement considérable, pour le procureur, du recours à des techniques d'enquête qui constituent une remise en cause de la place du juge d'instruction. C'est une question que pose le texte dans son ensemble, et qui n'a à aucun moment pu être discutée avec qui que ce soit, comme s'il s'agissait d'une injonction du ministère de l'intérieur. Chaque fois, on nous présente au départ ces techniques d'enquête comme des exceptions, destinées à ne servir qu'en matière de criminalité organisée et de terrorisme – avant de finir par devenir la norme. Quand on prend goût à des techniques d'enquête liberticides, on finit par se demander pourquoi on ne les utiliserait pas aussi pour tel ou tel crime ou délit. Elles permettent sans doute, ici ou là, d'arrêter certains auteurs, mais dans combien de cas n'ont-elles été d'aucun secours ?
Déjà, et sans vouloir ouvrir ici la polémique, certains services d'enquête utilisent ces techniques et le font « plus ou moins » dans les règles. Ainsi, mon collègue François Ruffin semble être sous le coup d'une enquête pour sédition… Des journalistes ont eu connaissance de certaines informations très personnelles qui, en théorie, ne peuvent être obtenues que par réquisition, et non par un simple service d'enquête…
J'appelle à la vigilance. Il faut mettre un coup d'arrêt aux pouvoirs exorbitants du procureur de la République ! Seul un juge d'instruction doit disposer de tels pouvoirs, qui doivent en outre être limités à la criminalité organisée et au terrorisme.
Vous allez sans doute évoquer le juge des libertés et de la détention, mais il n'est même pas compétent dans le cadre de l'extension de ces techniques d'enquête !
La situation est inquiétante : donner des pouvoirs supplémentaires sans les circonscrire, c'est prendre le risque qu'on les utilise à mauvais escient. Même les procureurs se plaignent – c'est le monde à l'envers ! – considérant que les préfets sont trop intrusifs dans leurs enquêtes relatives aux « gilets jaunes ». Nous avons également pu le constater en matière de terrorisme pendant l'état d'urgence.