Intervention de Mireille Robert

Réunion du mercredi 24 octobre 2018 à 10h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMireille Robert :

L'ONIAM est bien moins connu que sa raison d'être, les accidents médicaux symbolisés par les affaires du sang contaminé, du Mediator et de la Dépakine. Cet établissement public créé par la loi du 4 mars 2002 a pour mission une indemnisation amiable, rapide et gratuite des victimes d'accidents médicaux, sachant que la victime peut toujours, si elle le préfère, saisir les tribunaux. La procédure est simple et d'accès aisé. Dans chaque région, une commission de conciliation et d'indemnisation est chargée de faciliter le règlement amiable des litiges. Elle désigne des experts et émet ensuite un avis. C'est un système rapide : la victime est indemnisée au plus tard un an après le dépôt de son dossier. C'est un système sûr et efficace. Le recours à un établissement public garantit la bonne exécution des avis des commissions et la disponibilité des fonds.

Un rapport de la Cour des comptes rendu en février 2017 a dénoncé un processus jugé dévoyé après quinze années d'existence de la loi. Petit à petit, l'ONIAM a été chargé d'autres missions d'indemnisation : la réparation des dommages résultant d'une vaccination obligatoire, de la contamination transfusionnelle par le VIH, d'une contamination par le virus de l'hépatite B ou C par transfusion sanguine ou de l'usage du benfluorex-Mediator. Mais le mécanisme mis en place est très différent de celui prévu pour les accidents médicaux. C'est ainsi que la Cour dénonçait « une dérive de l'équilibre institutionnel initial, des résultats très éloignés des objectifs et de nombreuses et graves défaillances de gestion ». Selon la Cour des comptes, l'Office « intervient ainsi comme un assureur qui s'attacherait à limiter sa charge de sinistres ». Pour la Cour, le dispositif, peu attractif et peu performant, était un échec. Les demandes n'ont jamais dépassé les 4 500 dossiers par an et ont même diminué en 2015. Les CCI ont rejeté trois quarts des dossiers au regard de la gravité jugée insuffisante. Résultat : les saisines directes des tribunaux ont augmenté. En 2015, 17 % des victimes contestaient les décisions de l'ONIAM. En outre, les délais d'indemnisation s'étaient allongés et plus de la moitié des dossiers recevaient des offres partielles. La Cour appelait à une remise en ordre impérative du dispositif.

En tant que référente ONIAM, je vous ai rencontrée, madame Compagnon. Je me suis rendue dans les locaux de l'Office. J'ai trouvé un organisme meurtri, des personnels en souffrance mais qui, je tiens à le souligner, ont foi dans leur travail. Il faut savoir que le rapport de la Cour des comptes et ses suites ont été extrêmement mal vécus par les agents. Des perquisitions ont eu lieu dans l'établissement et au domicile des salariés. Des procédures juridictionnelles pour gestion de fait ont été engagées et des agents comptables lourdement condamnés. Le personnel n'est pas parti pour autant, et son engagement est sans faille. Je ne doute donc pas que vous réussissiez.

La Cour a incriminé la gouvernance. Depuis le 1er mars 2017, M. Leloup a repris la direction de l'ONIAM. Si le nouveau directeur a entamé un processus de changement bien visible, les salariés ont encore de grandes attentes.

Madame Compagnon, pouvez-vous nous rappeler quelles mesures ont été prises pour pallier les critiques de la Cour des comptes ? Quelles actions avez-vous entreprises pour que le dispositif amiable d'indemnisation des victimes se révèle au moins aussi avantageux que le contentieux classique devant les tribunaux ? Vous avez déjà mené un grand travail de revalorisation de la grille d'indemnisation, mais des écarts subsistent avec les tribunaux. Le référentiel ONIAM demeure inadéquat. Quelles suites comptez-vous donner ? L'accès au dossier médical par la victime est un vrai sujet. Une solution qui répondrait aussi à une demande de l'IGAS est la mise en place d'un dossier médical partagé. Qu'en pensez-vous ? Enfin, une des priorités du nouveau directeur est la dématérialisation. Seuls l'État et l'assurance maladie sont financeurs. L'expertise médicale est difficile à trouver. En outre, la population n'est assurée qu'à 90 %. Quelle est votre vision pour l'avenir ?

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