Madame Compagnon, je voudrais requérir votre avis sur une de nos propositions, inspirée par la lecture, en avril dernier, dans la presse financière britannique, d'une analyse de Goldman Sachs consacrée au défi économique que représentent pour le secteur pharmaceutique les nombreux progrès enregistrés ces dernières années, qui revenait à poser cette question cynique : est-ce que guérir des patients est un modèle économique soutenable ? Notre système de soins favorise de plus en plus les stratégies commerciales des grandes firmes pharmaceutiques. Ces dernières années, les revenus des cinq principaux groupes pharmaceutiques ont dépassé 200 milliards d'euros pour 47 milliards d'euros de bénéfices. Notre système de santé est largement plus basé sur l'offre de soins que sur la prévente. Seriez-vous favorable à la création d'un pôle public du médicament chargé à la fois de la recherche via des coopérations avec l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) et le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), et de production de médicaments jugés essentiels ? Ce pôle pourrait s'appuyer sur les pharmacies centrales des hôpitaux et les pharmacies centrales des armées, mais son caractère public garantirait l'indépendance de la recherche et de l'expertise pour la fabrication. Il permettrait d'inverser le rapport de force entre la puissance publique et l'industrie pharmaceutique. Compte tenu du nombre d'incidents dus à l'hyperconsommation de médicaments et de l'arrivée de nouveaux traitements toujours plus onéreux et à l'efficacité n'est pas toujours prouvée, une telle régulation nous semble nécessaire.