Pour faciliter la tâche des CAF – on peut comprendre cette volonté – , vous voulez soumettre la révision du montant de la pension alimentaire à un barème national. Or le recours à un tel barème fait courir le risque que le montant de pension soit fixé en fonction de paramètres statistiques, sans tenir compte de la spécificité de chaque situation. On peut en outre s'interroger sur le respect des garanties de compétence et d'impartialité qui est exigé des CAF. Il est à craindre que les CAF, faute de compétences et de moyens, s'en remettent au seul barème. On peut même imaginer que la décision revienne à un algorithme dont la maîtrise n'est pas assurée. Or, c'est là l'intérêt de l'intervention du juge, chaque situation comprend de nombreux paramètres qu'il sera délicat de combiner pour parvenir à une solution adaptée.
Selon l'étude d'impact, l'expérimentation sera limitée « aux cas les plus simples, où il est possible de se référer à un barème », à savoir « les modifications les plus simples liées à une modification des revenus, c'est-à-dire celles qui n'appellent pas d'appréciation circonstanciée des éléments du cas d'espèce ». C'est un aveu terrible de l'inadaptation du dispositif. En effet, les situations, par nature difficiles, demandent à être examinées au cas par cas, en prenant en compte les aspects financiers mais aussi tous les autres facteurs.
Sans vouloir énerver la rapporteure, nous avons bien compris hier que l'expérimentation vise à résoudre un problème de délai, objectif que nous pouvons partager. Mais on ne peut pas se contenter de répondre à une administrée : « Ne vous inquiétez pas, madame, ce sera rapide, un barème va traiter votre cas » – ou peut-être maltraiter. La réponse réside dans les moyens attribués à la justice. Celle que vous proposez – la CAF va s'en occuper avec l'aide d'un barème – n'est pas la bonne. Où est l'intérêt de l'enfant ? Il est question de familles dans l'expérience que vous entendez mener.
Outre la suppression de la référence au barème national que prévoit cet amendement, je vous demande, madame la garde des sceaux, dans le choix des cinq départements où l'expérimentation sera conduite, d'épargner le mien, la Meurthe-et-Moselle !