Intervention de Sandrine Clavel

Réunion du mercredi 16 janvier 2019 à 9h35
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Sandrine Clavel :

Les justiciables peuvent avoir accès au CSM par le biais d'une procédure créée par la révision constitutionnelle de 2008 mais qui n'est pas très efficace. Dans ma réponse écrite, j'ai indiqué que ce défaut d'efficacité me semblait relativement préoccupant même si je pouvais en comprendre les ressorts : le droit d'accès peut se révéler contre-productif s'il donne au justiciable le sentiment qu'il existe une forme de corporatisme. On entend beaucoup dire que les juges ne sont pas responsables, qu'ils ne sont jamais redevables de ce qu'ils font. Cela ne signifie pas qu'il faut juger les juges en permanence mais il faudrait que la procédure qui permet aux justiciables de saisir le CSM soit plus efficace. Comment ? En toute modestie, je vais vous donner quelques pistes de réflexion en ne sachant pas si elles sont exploitables.

Tout d'abord, il faut s'assurer d'une bonne information. Si les requêtes ne sont pas recevables, c'est parce que, la plupart du temps, les griefs exposés ne sont pas en lien avec la procédure. De nombreux justiciables passent par l'assistance d'un avocat pour saisir le CSM, même si ce n'est pas une obligation. Un premier travail d'information pourrait être fait par le CSM en partenariat avec les instances représentatives des avocats – le Conseil national des barreaux ou les différents barreaux – pour que les avocats s'approprient mieux cette procédure. Il est plus compliqué de toucher les justiciables qui ne sont pas assistés d'un avocat. Peut-être serait-il possible de développer l'information mise à disposition des justiciables sur le site du CSM qui, de ce point de vue, n'est peut-être pas aussi pédagogique qu'il pourrait l'être ? Je pense que c'est d'abord par cette pédagogie vis-à-vis des auteurs de saisine que l'on pourra renforcer l'efficacité de la procédure.

En matière de déontologie, si j'ai bien compris, vous me demandez si les magistrats ne devraient pas avoir la possibilité de saisir un interlocuteur ou une instance de leurs difficultés quotidiennes. Je pense que c'est extrêmement important. Les principes généraux ont besoin d'être concrétisés et il faut pouvoir échanger. Les organes chargés de ce conseil déontologique peuvent jouer un rôle. À l'heure actuelle, nous avons plutôt trop d'organes que pas assez puisque nous avons une dualité : le collège de déontologie créé par la loi organique de 2016 ; le Service d'aide et de veille déontologique mis en place par le CSM. C'est sans doute un peu trop. L'existence de deux instances peut troubler les esprits. Il me semble qu'une seule instance serait préférable, comme je l'ai indiqué dans mes réponses écrites.

Mon expérience universitaire m'a appris l'importance du réseau et des échanges entre pairs, quand on veut que les membres d'une profession s'approprient quelque chose – en l'espèce, la déontologie. Les magistrats peuvent échanger avec le CSM mais il serait intéressant qu'ils puissent le faire aussi avec des pairs confrontés aux mêmes difficultés quotidiennes qu'eux. Cette logique plus horizontale porte ses fruits. Voilà quelques pistes que je peux proposer pour répondre à vos questions.

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