Monsieur le ministre de l'intérieur, je souhaite vous interroger sur les problèmes que rencontre le département de la Seine-Saint-Denis en matière d'effectifs d'officiers de police judiciaire – OPJ. En effet, sur la métropole du Grand Paris, par comparaison avec Paris, les Hauts-de-Seine et le Val-de-Marne, où les OPJ représentent respectivement 16,9 %, 12,4 % et 15,2 % des effectifs de police, ceux de la Seine-Saint-Denis n'en représentent que 9,4 %.
Les OPJ sont ceux qui reçoivent les plaintes et mènent l'enquête. Dans le premier district de la Seine-Saint-Denis, dont je suis élu, pour pallier ce manque, ils ont été regroupés, par décision du préfet de police, le week-end à Bobigny et les jours de la semaine, entre six et neuf heures, dans l'un des commissariats du district. Concrètement, pour les rencontrer, les citoyens doivent se déplacer loin de chez eux, dans d'autres villes, alors qu'il existe dans ce département une grande précarité : certains renoncent donc à porter plainte.
Ce manque criant d'effectifs pose d'autres problèmes majeurs. Premièrement, c'est la capacité même d'investigation des policiers qui est amoindrie : moins d'OPJ, c'est moins d'enquêteurs ; on poursuit donc moins les délits dont sont victimes les habitants de ce département. Avec des OPJ en effectif réduit travaillant sur un grand nombre de dossiers, le risque de prescription s'accentue également, car des dossiers qui ne sont pas considérés comme urgents peuvent être mis de côté jusqu'à ce qu'à l'expiration du délai. Le risque existe aussi que des affaires soient traitées à la hâte et que les recherches ne soient pas véritablement menées. Tels sont les dysfonctionnements que peut créer cette situation.
Je passe sur les détails : tous les actes de procédure doivent être déplacés entre les commissariats, par exemple de celui de Drancy, la ville où j'habite, vers celui de Bobigny, le vendredi soir, pour reprendre le même chemin en sens inverse le lundi matin. Tout cela consomme du temps policier et fait courir des risques aux éléments matériels, voire aux procédures.
De telles carences affectent de surcroît le travail et l'efficacité des polices municipales. Je peux ainsi témoigner des longues heures consacrées par les policiers municipaux à conduire à Bobigny les personnes interpellées pour les présenter à l'OPJ, qui ne peut évidemment pas tout traiter en même temps : plus de la moitié d'une nuit de police municipale se passe ainsi au commissariat de Bobigny, à attendre que la personne interpellée soit prise en charge.
Ce sont donc moins de missions de prévention, de surveillance du bon ordre, de sûreté et de sécurité publique, alors que ces missions sont fondamentales dans l'un des départements les plus criminogènes de France.
Monsieur le ministre, qu'entendez-vous faire pour que des OPJ soient affectés en Seine-Saint-Denis et pour que la situation actuelle du premier district, présentée initialement par le préfet comme provisoire, ne soit pas définitive, comme il semble qu'elle soit en train de le devenir ? Nous devons disposer d'OPJ en nombre suffisant pour répondre aux enjeux et aux besoins d'un département qui, comme vous ne l'ignorez pas, souffre de la délinquance.