Monsieur le député, je n'ai pas les mêmes chiffres que vous, mais peu importe : ceux dont je dispose révèlent, de toute façon, la réalité que vous évoquez et le décalage qui existe bel et bien : il n'y a pas assez d'OPJ sur votre territoire et, plus généralement, sur la couronne parisienne. Cette carence se traduit par une déficience en termes d'efficacité, que vous avez fort bien décrite et que je ne remettrai pas en cause.
Il y a plusieurs causes à cette situation. Tout d'abord, la procédure pénale est de plus en plus complexe, ce qui rend aujourd'hui peu attractive la police judiciaire. C'est une vraie difficulté : notre police judiciaire est l'une des meilleures du monde, mais de nombreux policiers ne souhaitent plus s'orienter vers cette filière.
Cela tient d'abord à des raisons techniques, indemnitaires et statutaires, et au principe de la liberté du fonctionnaire : on ne peut pas contraindre un OPJ à rejoindre un service déficitaire. Je ne souhaite pas nécessairement remettre en cause ce principe, mais c'est un chantier que nous avons décidé d'ouvrir avec les organisations syndicales.
Il faut aussi évoquer la simplification des procédures pénales, qui est l'urgence absolue. Ce boulot est devenu si complexe, si difficile, avec un tel risque d'erreur lié à la superposition des procédures judiciaires, qu'il n'est, au bout du compte, pas attractif – j'étais encore hier soir avec des officiers et des agents de police judiciaire, qui me faisaient part de ces problèmes. Conduire des enquêtes est pourtant l'essence même du travail de policier ; c'est une passion pour ceux qui s'y engagent, mais ces difficultés tant judiciaires qu'administratives réduisent le nombre de candidats et nous ne savons pas fidéliser les effectifs en améliorant l'attractivité des postes.
Ce n'est pas une question budgétaire : dans votre département, les postes sont ouverts, mais nous n'arrivons pas à les pourvoir. C'est un chantier que nous aborderons, dans les six mois, au moment de la négociation d'un accord salarial avec une partie des syndicats de la police, comme avec l'encadrement. Nous devons renforcer l'attractivité judiciaire et ramener les policiers vers le coeur de leur métier.
Il faut aussi poursuivre le chantier de la simplification. Le projet de loi de réforme de la justice y contribue ; un travail réglementaire mené entre le ministère de la justice et le ministère de l'intérieur doit y contribuer aussi. Nous devons agir.
Quant au regroupement des permanences judiciaires en fin de semaine et les jours fériés, que vous avez évoqué, il a été instauré dans certaines circonscriptions de sécurité et de proximité de Seine-Saint-Denis pour améliorer l'efficacité de la police – c'est comme cela qu'on me l'a présenté, voilà trois mois, lorsque j'ai pris mes fonctions. Mon expérience, comme les échanges que j'ai pu avoir avec vous et avec d'autres parlementaires, me laissent penser que ce n'est pas forcément le cas. C'est pourquoi j'ai demandé au préfet de police une évaluation précise de cette expérimentation, qui doit être effectuée dans les mois qui viennent, avant la fin du premier trimestre. Nous pourrons ainsi décider s'il faut revenir en arrière, dans le cas où ce dispositif retirerait des droits aux usagers et entraînerait pour les policiers des conditions de travail qui ne seraient pas satisfaisantes.