Intervention de Stéphane Peu

Séance en hémicycle du mercredi 30 janvier 2019 à 15h00
Prévention et sanction des violences lors des manifestations — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Peu :

Cet article illustre pleinement la difficulté à concilier une loi de circonstance avec la pérennité du droit, en l'espèce celui de manifester.

D'abord, on ne peut absolument pas assimiler la participation à un spectacle sportif au droit de manifester, qui est un droit à valeur constitutionnelle.

Deuxième remarque : on justifie la volonté de prendre des décisions de caractère discriminatoire interdisant à tel ou tel d'aller manifester en évoquant le spectacle de casseurs, que tout le monde ici a en tête. Nous souhaitons tous, je pense, qu'ils soient mis hors d'état de nuire, mais les actes illégaux, voire violents, ne sont pas toujours illégitimes ou incompréhensibles dans les conflits sociaux : on peut comprendre la très grande désespérance et la très grande colère d'ouvriers qui arrivent un matin sur leur lieu de travail pour découvrir qu'un patron voyou a déménagé dans la nuit leur outil de travail avant de se réfugier dans un paradis fiscal, ou qui occupent une usine qui licencie alors que ses propriétaires touchent beaucoup de dividendes. On peut comprendre qu'ils commettent des actes certes répréhensibles, mais qui sont l'expression d'une souffrance sociale.

Avec une telle mesure, les préfets pourraient demain, selon leur bon vouloir, inscrire les Conti d'Amiens ou les travailleurs d'Arcelor en Lorraine et d'autres encore – je ne vais pas énumérer tous les conflits sociaux que notre pays connaît – sur la liste de ceux à qui il est interdit de manifester, des travailleurs de bonne foi que le désespoir a pu pousser à recourir à des solutions extrêmes pour exprimer leur colère. C'est une menace terrible pour le droit de faire grève et de manifester dans notre pays !

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