En octobre dernier, le Gouvernement lançait la concertation « Ensemble pour une école inclusive ». Hélas, tout porte à croire, aujourd'hui, que les actions menées en la matière se situent largement en deçà de l'urgence de la situation. Les moyens mobilisés ne sont ni à la hauteur des ambitions affichées, ni, surtout, des besoins exprimés. Certes, nous nous félicitons que ce sujet soit à l'ordre du jour : je ne conteste pas ici les intentions ; je ne parle que des actes.
Avant même les déclarations affichées, le ministère de l'éducation nationale fermait, sans même prévenir les professeurs et les parents, la seule classe de langue des signes du département de Seine-Saint-Denis, dont je suis député. Ce n'est pas là un cas isolé ou anodin. Je tiens à le rappeler, à la rentrée dernière, cette fois à Argenteuil, une autre classe spécialisée fermait elle aussi ses portes, dans une certaine indifférence des responsables académiques. Des élèves de niveau élémentaire se sont ainsi retrouvés dans des classes de niveau cinquième, ce qui, vous en conviendrez, est une aberration pédagogique et, sans doute, une marque d'irrespect pour les enfants concernés.
Aucun accompagnement spécifique, si ce n'est celui de professeurs dévoués, comme toujours, mais pris au dépourvu, n'a été prévu lors des réorientations. Ce n'est là qu'un triste indicateur de la marginalisation dans laquelle, parfois, le Gouvernement plonge ces structures spécialisées, dont l'efficacité n'est pourtant plus à démontrer.
J'y insiste : l'enseignement en langue des signes s'est révélé un excellent outil en offrant aux enfants sourds les conditions optimales de leur intégration. Les classes spécialisées sont les seules à proposer un enseignement adapté à la situation des élèves. Ce n'est pas aux élèves de se conformer aux structures, mais à l'éducation nationale de s'assurer que personne ne soit laissé sur le côté. En détruisant les structures adaptées, vous entretenez en quelque sorte, monsieur le ministre, le mythe de l'inclusion spontanée. La réalité, cependant, est la marginalisation et le recul des ambitions affichées. La seule justification apportée à ces fermetures, en général, est le manque d'élèves demandeurs. Mais la réalité est bien différente.
La suppression de dizaines de milliers de contrats aidés a accentué cette logique d'exclusion. Elle a touché, entre autres, des associations et des services publics dont certains participaient à l'insertion des personnes handicapées.
En effet, selon une étude de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques du ministère du travail – DARES – datant de 2016, 64 % des recrutements dans le secteur marchand ne peuvent avoir lieu sans ces dispositifs. Ainsi, les intéressés ont encore moins de possibilités d'intégrer le monde professionnel alors que leur taux de chômage est déjà deux fois supérieur au chômage global, ce qui le porte à près de 20 %.
À ces difficultés patentes touchant l'emploi s'ajoutent celles de l'accessibilité, notamment du logement. À ce sujet, je proteste contre la manière dont, par la loi dite ELAN, le Gouvernement a abaissé à 10 % du nombre total de logements la proportion de logements neufs accessibles, alors même qu'aujourd'hui, des 155 000 appartements neufs construits chaque année, seuls 109 000 sont respectueux des normes en question. Cette décision ne pourra que dégrader les conditions d'accueil.
En outre, comment nos collectivités pourraient-elles rendre accessibles les bâtiments et l'espace public alors que le Gouvernement ne cesse de baisser leurs dotations ? Et il en va de même des prestations : le Gouvernement s'obstine ainsi à refuser de porter l'allocation aux adultes handicapés au-dessus du seuil de pauvreté.
Ces problèmes, nous ne pouvons les ignorer. La proposition de loi déposée par le groupe Socialistes et apparentés, que je tiens à remercier, nous semble donc aller dans le bon sens. Elle donne des pistes de réponse qui ne sont parfois que des pistes, mais qui ont le mérite d'exister et qui sont justes.
Je conclurai en insistant, après Laurence Dumont, sur la précarisation des AESH, qui ne saurait durer plus longtemps. Quand il y va de la marginalisation des personnes handicapées, il n'est pas possible de faire des compromis. La pleine accessibilité des établissements scolaires, des logements et de toutes les structures doit être garantie partout.
En conséquence, nous soutiendrons cette proposition pour que le débat ait lieu et que des décisions soient prises.