Intervention de Géraldine Bannier

Séance en hémicycle du jeudi 31 janvier 2019 à 15h00
Pour une école vraiment inclusive — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGéraldine Bannier :

Ce n'est pas l'idée que je me faisais de ce lieu de la République.

Si le sujet crucial de l'amélioration des conditions de l'accueil des élèves en situation de handicap à l'école fait régulièrement l'objet de débats à l'Assemblée, il va de pair avec celui de leur accompagnement tout au long de leur scolarité. Un accompagnement qui est depuis longtemps insatisfaisant, quoiqu'il y ait aussi de vraies réussites locales dont j'ai pu être témoin ces dernières années dans mes classes, mais qui demandent évidemment à être étendues.

Nous nous réjouissons donc que la représentation nationale s'empare une nouvelle fois de cette problématique. Le Gouvernement s'y attelle avec force et détermination, par l'action conjuguée de Jean-Michel Blanquer et de Sophie Cluzel.

Toutefois, nous regrettons ce calendrier trop serré. En effet, les conclusions de la consultation des acteurs, qui est en cours, devraient être rendues le 11 février, ce qui sera l'occasion, espérons-le, d'annoncer des mesures pour mieux prendre en charge les élèves en situation de handicap.

La proposition de loi du jour en faveur d'une école vraiment inclusive présente au moins le mérite de nous permettre de débattre d'un sujet central et d'acter de nombreuses avancées. Il est de notre responsabilité de continuer à améliorer l'accueil de ces enfants. Cette année, 340 000 enfants en situation de handicap doivent être scolarisés. 175 000 d'entre eux, soit 6 % de plus qu'à la rentrée précédente, ont besoin d'un accompagnement. Les premiers jours de l'année scolaire ont révélé des retards et des dysfonctionnements dont nous ne pouvons nous satisfaire.

Il est donc primordial de trouver une solution pour – et avec – les AESH. En effet, nous ne voulons pas imposer des solutions qui n'aboutiraient pas. À l'heure du grand débat national, l'éthique du dialogue doit être respectée à tous les échelons. Nous aimerions ne pas passer par-dessus la tête des acteurs engagés dans la concertation.

Certes, nous devons trouver des réponses, mais des réponses qualitatives. La concertation doit nous permettre d'aller plus loin, de construire et de réfléchir ensemble à des améliorations concrètes. L'intégration doit se faire dans les meilleures conditions afin de trouver des réponses adaptées aux besoins des enfants et des accompagnants. À ce titre, nous devons légiférer convenablement et dans un esprit constructif. Il est donc logique de connaître la teneur des échanges en cours avant de voter une nouvelle loi.

Par ailleurs, l'essentiel des mesures dont nous discutons ne relèvent pas du domaine législatif mais du domaine réglementaire. N'empiétons pas sur le terrain des vrais acteurs et des premiers concernés.

Le groupe du Mouvement démocrate voit dans cette nouvelle proposition de loi l'opportunité de participer à la réflexion actuelle, de débattre, de proposer. Aussi a-t-il déposé en commission des amendements notamment pour étendre les missions des équipes de suivi de la scolarisation à un rôle d'interface avec les parents.

Il souhaite se saisir de cette occasion pour rappeler trois principes importants qui doivent guider notre réflexion.

Tout d'abord, les politiques publiques doivent tenir compte des différents degrés de handicap pour orienter l'enfant vers la structure qui sera la meilleure pour lui. Si les contacts entre enfants handicapés et non-handicapés sont à rechercher autant que possible, le placement par principe d'un enfant handicapé en milieu scolaire peut aussi lui être préjudiciable. La personnalisation est la clef.

Ensuite, il est indispensable de réfléchir à l'accompagnement des personnes en situation de handicap, enfants ou adultes, en termes de parcours. La continuité du parcours, la lutte contre les ruptures doivent être des priorités à chaque étape de la vie, comme le préconise le rapport Piveteau, mais également à l'échelle de la journée de l'enfant. C'est pourquoi nous avons accueilli favorablement la proposition, à l'article 3, d'une meilleure association des accompagnants au parcours de l'élève.

Troisièmement, il est important de ne pas faire preuve de démagogie et de prendre le temps de bâtir des réponses à la hauteur de la situation.

Le groupe Modem et apparentés souhaite que les propositions qui seront appliquées dès la rentrée 2019, suite à la concertation « Ensemble pour une école inclusive », lancée auprès du Conseil national consultatif des personnes handicapées, prennent en compte les trois principes énoncés.

Cette concertation, annoncée dès juillet 2018 et qui a débuté en octobre, illustre l'action de la majorité pour favoriser l'accompagnement des élèves en situation de handicap. Ainsi, depuis le début du quinquennat, le statut unique d'AESH, aidant à l'inclusion scolaire, a été partiellement revalorisé par le passage d'une logique de recours aux contrats aidés à une logique de professionnalisation. Le projet de loi de finances pour 2019 prévoit d'ailleurs de financer 12 400 nouveaux emplois d'AESH. Au total, 43 041 équivalents temps plein d'AESH seront financés cette année et plus de 29 000 emplois aidés ont été créés.

De surcroît, le décret du 27 juillet 2018 consolide la formation initiale du diplôme d'État d'accompagnant éducatif et social, qui comporte une spécialité « éducation inclusive et vie ordinaire », en affichant l'obligation d'un volume de soixante heures de formation continue. Des mesures de simplification et d'amélioration du système d'information des Maisons départementales des personnes handicapées de Paris sont d'ores et déjà programmées pour en simplifier le fonctionnement. Par exemple, l'allocation aux adultes handicapés sera octroyée à vie lorsque le handicap n'est pas susceptible d'évoluer. Il ne sera plus nécessaire de déposer un nouveau dossier à la MDPH tous les quatre ans.

Parallèlement, trente-huit unités localisées pour l'inclusion scolaire – ULIS – ont été créées, après les quarante unités déjà mises en place en 2017 et 2018 au sein des lycées d'enseignement général, technologique et professionnel. L'objectif est d'ouvrir 250 ULIS supplémentaires au lycée d'ici 2022.

Le groupe Modem se réjouit de ces avancées mais, malgré des progrès indéniables ces dernières années et une politique volontariste de notre Gouvernement, trop d'obstacles persistent pour une scolarisation appropriée des élèves handicapés. L'intégration des élèves handicapés à l'école reste un défi majeur. Si de nouveaux outils se développent, les questions liées aux délais et à la continuité de l'accompagnement, à la lutte contre les ruptures, à chaque étape de la vie mais également à l'échelle de la journée de l'enfant, sont particulièrement saillantes. Trouver une réponse à ces questions est primordial pour notre famille politique.

C'est pourquoi nous pensons que le texte issu de la commission comporte un certain nombre d'avancées non négligeables qui permettent d'amorcer un mouvement sur le long terme pour améliorer les conditions de travail des personnels encadrant et des élèves.

Nous prenons acte de la volonté du Gouvernement et de la majorité, à laquelle nous appartenons pleinement, de proposer des éléments concrets, en particulier un meilleur accompagnement et une meilleure concertation entre les parents et les enseignants en charge de l'enfant, l'association des personnels d'accompagnement dans le suivi de la scolarisation, et enfin l'amélioration des connaissances statistiques dans ce domaine. Ce sont là des éléments qui restent à améliorer. La concertation aboutira très rapidement et nous pourrons nous appuyer sur les conclusions qui en ressortiront pour faire rapidement avancer la réglementation dans ce domaine.

C'est pourquoi le groupe du Mouvement démocrate et apparentés souhaite que le débat en séance puisse donner lieu à des avancées consensuelles, qui devront être amplifiées par la suite. Nous abordons donc ce débat avec confiance et dans un esprit constructif que nous espérons partagé.

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