Il ne s'agit pas, madame la rapporteure, d'une théorie du complot, mais d'une situation de fait qui ne vous a pas échappé : nombre de magistrats, pour ne pas dire la majorité, sont mobilisés contre l'absence de moyens qui dégrade la façon dont la justice est rendue. Il s'agit d'une évidence ; j'espère que vous l'avez constaté. Deuxièmement, nous connaissons tous la réalité : les comparutions immédiates sont une manière finalement dégradée de rendre la justice, les moyens de la défense étant souvent réduits.
Souvent, la personne interpellée se voit conseiller la comparution immédiate – on lui dit que la procédure sera plus facile et rapide, qu'une procédure plus longue peut donner lieu à une sanction plus lourde. Mais certains éléments sont uniquement rapportés par la police et peuvent se révéler erronés. En tant que législateurs, nous ne pouvons considérer la comparution immédiate comme une bonne manière de rendre la justice.
Sans ouvrir un grand débat, la situation politique fait que le rapport de nos concitoyens aux organisations politiques – qu'elles soient syndicales, associatives ou partisanes – a changé. Quelle que soit l'opinion que l'on puisse avoir sur le mouvement des gilets jaunes, il constitue une forme nouvelle de mobilisation, où des gens se mobilisent sans passer par des organisations. La conséquence est que la déclaration d'un parcours officiel est rendue difficile, faute d'organisateur et de porte-parole du mouvement. De même, lorsque des lycéens se mobilisent, lorsqu'un lycée « débraye » comme on dit vulgairement, personne ne déclare de parcours.
C'est sans aucun doute une difficulté. Il serait mieux que le parcours soit déclaré, que nous disposions d'interlocuteurs ; mais, dans la réalité, cela n'est pas le cas aujourd'hui. Gare donc au durcissement de certaines situations, qui engendre une suspicion généralisée et qui aboutit surtout une fois de plus, à partir d'éléments minoritaires de violence, à une justice expéditive. Finalement, les sanctions sont disproportionnées et n'affectent généralement pas les véritables responsables d'éventuelles dégradations.