Intervention de Jean-Louis Bourlanges

Réunion du jeudi 5 octobre 2017 à 9h30
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bourlanges :

Ce débat nous met tous mal à l'aise. Pourquoi ? Parce qu'il est mal posé – pas par notre rapporteur, qui a excellemment exposé les enjeux du sujet –, mais mal posé dans la sphère publique.

Premièrement, parce qu'on est très réservé sur la nature des expertises qui nous sont fournies, on n'est pas en mesure de porter une appréciation claire sur la qualité du produit. Deuxièmement, partant de la supposition que le produit est mauvais - ce que j'incline, mais de façon un peu empirique, à penser – les discussions portent sur ceux qui seraient autorisés à continuer à mal faire et ceux à qui ce serait interdit. Et là, on voit bien qu'on a des populations qui sont plus ou moins importantes sur le plan électoral, plus ou moins légitimes sur le plan social. Alors on dit aux particuliers qu'ils peuvent arrêter, mais le demander aux agriculteurs, c'est plus difficile. Il me semble que cela n'est pas satisfaisant : soit c'est bon, soit c'est mauvais. Troisièmement, on discute sur les délais : combien de temps pouvons-nous mal faire ou bien faire ?

Ce sont trois mauvaises questions. La question centrale se décline en trois sous-questions. La première concerne les conditions de diagnostic : il faut établir les conditions d'un diagnostic, et il faut que nous disions, comme l'a dit Monsieur Anglade, que si les agences sont suspectes, il faut savoir pourquoi, en faire le procès, les réformer, les modifier… En tout cas nous avons besoin d'une autorité européenne fiable en matière de diagnostic. On pourra commencer à réfléchir de façon sereine et politique à partir du moment où techniquement nous serons calés.

Après le diagnostic, il faut un modèle. Le principe de précaution est une chose, mais le risque zéro n'existe pas. Tout produit, toute activité, toute pratique humaine est plus ou moins toxique. C'est dans ce « plus ou moins » que réside notre latitude d'action. Donc il ne s'agit pas simplement d'interdire ou d'autoriser, mais de bâtir, d'avoir un modèle alternatif, complémentaire que nous pourrions mettre en oeuvre pour en apprécier la toxicité relative par rapport au système actuel. On a besoin de faire du « benchmarking », si je puis dire, en ce domaine.

Nous avons donc besoin d'un diagnostic, d'un modèle et, ensuite, d'un parcours, c'est-à-dire d'une gestion du temps. Il est évident qu'on peut me dire à moi que dans mon jardin j'arrête du jour au lendemain d'utiliser ce genre de produit, et que cela ne sera pas un problème. En revanche, je comprends que pour des exploitations agricoles ça soit tout à fait différent. Donc, il faut donner du temps au temps, savoir comment en sortir d'une façon efficace et vertueuse à la fois, mais pas simplement pour dire : « vous pouvez encore commettre le péché pendant quelques années ».

Les deux questions du modèle et du parcours ne peuvent pas être abordées sereinement, parce que nous n'avons pas les éléments de réponse à la première : le diagnostic. C'est cela, je crois, qui nous embarrasse tous.

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